1765.Le chevalier de Fronsac,jeune naturaliste parisien,est envoyé par le roi dans la région du Gévaudan afin d'y examiner le mystérieux animal qui y commet de nombreux meurtres.Mais il faudrait pour cela que la bête fût tuée ou capturée,ce qui n'est pas encore le cas.Secondé par son ami iroquois Mani,qu'il a ramené du Canada,et aidé par la noblesse locale,Fronsac se lance dans une enquête qui va lui réserver bien des surprises.Immense succès à sa sortie,le film est écrit et réalisé par Christophe Gans,ex journaliste ciné et rédacteur en chef de Starfix,qui s'inspire d'évènements bien réels et jamais résolus,l'énigme de la Bête du Gévaudan.Dès le début du film,l'auteur nous balance un grand coup au plexus avec sa mise en scène musclée et ultra spectaculaire tandis qu'il installe une ambiance sombre et angoissante tout-à-fait immersive.Cinéphile chevronné,Gans a retenu les leçons du cinéma d'action américain et des films d'arts martiaux hong-kongais,régurgitant avec puissance et talent ces influences sur l'écran,tout ceci dans le cadre suranné d'une France d'autrefois et en casant ça dans le genre cape et épée.Ces mélanges provoquent une déflagration notoire décuplée par la qualité d'une réalisation multipliant les affèteries techniques,alternances de plans,changements d'axes,ralentis,accélérés,floutages,au milieu de décors magnifiques de province profonde alignant forêts obscures et inquiétantes,villages anciens de vieilles pierres et châteaux-forteresses,parfois de nuit et souvent sous la pluie,voire la neige.En outre les personnages ne sont pas avares de physiques bizarres et de comportements inquiétants,le héros se sentant de plus en plus menacé à mesure que ses investigations progressent.Bien sûr la vérité historique est traitée de manière plus que fantaisiste,mais le spectacle est si intense,il l'est encore vingt ans après,qu'on n'y prête guère attention.C'est pourtant souvent n'importe quoi entre un indien du Québec chamane et champion de kung-fu,une bête sauvage meurtrière qui marche au sifflet,une prostituée italienne espionnant pour le Vatican et un complot de cathos ultras opposés à un roi trop favorable aux Lumières.D'ailleurs l'histoire se délite progressivement,traîne en longueur et s'affale lors de scènes finales très jobardes sous-tendues par un progressisme déjà bien présent en cette année 2001.Des protagonistes meurent et ressuscitent,des aristos campagnards réunis en société secrète font des réunions nocturnes genre Klu Klux Klan,la terrible bestiole se livre à des combats clandestins contre des loups,toute la région est apparemment mouillée dans la combine mais c'est resté caché durant des années,la pute vaticane charge à la tête de l'armée française,bref ça serait carrément comique si ce n'était aussi bien filmé.On apprend au fil de la narration que les militaires tricolores ont commis des crimes de guerre en Nouvelle-France,que les nobles,les curés et les hauts fonctionnaires sont des factieux racistes,sadiques et incestueux et que la civilisation amérindienne est infiniment supérieure à la nôtre car voyez-vous ces gens sont des chamanes guérisseurs dotés d'une forte perception extra-sensorielle,ce qui convenons-en finit par constituer beaucoup d'atouts.Ironiquement,le film se clôt sur un épisode de la Révolution qui voit le marquis d'Apcher,un des rares aristos gentils de l'histoire,se faire arrêter en vue d'un guillotinage express perpétré par ces sympathiques croquants que sa philosophie lui intimait de défendre.Comme quoi trahir sa classe n'est jamais une bonne idée.En sus de la brillante réalisation,le casting de luxe contribue fortement à soutenir le film.Samuel Le Bihan crève l'écran en chevalier pur et dur,Vincent Cassel est délectable en comte dévoyé,Emilie Dequenne,mutine et insolente,incarne avec grâce la jolie Marianne,Jérémie Rénier est très bien en marquis amical et le bastonneur Mark Dacascos prouve qu'il est plus qu'un as du coup de pied retourné.Monica Bellucci,à l'époque épouse de Cassel,joue de ses charmes dont elle n'est pas avare,et il y a aussi Jean Yanne dans une de ses dernières apparitions,il décèdera deux ans plus tard,fatigué mais toujours parfait,Jean-François Stévenin,excellent en prêtre manipulateur et hypocrite,Edith Scob en marquise grenouille de bénitier,Johan Leysen en tueur de loups fier-à-bras,Bernard Farcy en intendant corrompu,Philippe Nahon en guérisseur douteux,Eric Prat en capitaine dépassé par la situation,Bernard Fresson en conseiller du roi retors,Jean-Paul Farré en abbé allumé,Nicolas Vaude en poète ridicule,André Penvern qui joue Buffon et François Hadji-Lazaro,le leader des Garçons Bouchers,en gardien de prison.Sans oublier un Gaspard Ulliel de 17 ans tournant son premier long-métrage et un Jacques Perrin interprétant Rénier vieux.