Anomalie dans le paysage cinématographique française, Le Pacte des loups propose une relecture audacieuse de la légende du Gévaudan et de sa bête en restituant intelligemment l’esprit du siècle marqué par une peur conspirationniste omniprésente et un sentiment de défiance par rapport à la royauté. Christophe Gans fait de sa mise en scène un laboratoire où s’assemblent magnifiques mais parfois trop nombreux ralentis avec scènes de bavardage mondain, traques terrifiantes et érotisme sensuel. De ce brassage d’influences ressort un solide métrage à l’architecture mouvante, cultivant son goût pour la surprise et l’anticonformisme jusqu’à franchir – en apparence du moins – la frontière entre vivants et morts, monstres réels et créature de synthèse. On sent que la bête humaine sommeille sous le lourd costume conventionnel, que la passion noue la gorge de la vertueuse femme ; Gans n’hésite d’ailleurs pas à alterner les ruptures de ton comme autant d’incompatibilités jetées entre nature et culture, dont la frontière s’avère néanmoins des plus poreuses. Une œuvre atypique et pertinente.