Humour nain, mise en scène brillante, détails saugrenus

Le comique muet a eu de nombreuses vedettes sur-actives, dont les plus éminentes sont Keaton et Chaplin. La plupart sont passées aux oubliettes, parfois même pour leurs contemporains, le public pouvant se lasser brusquement. Fatty Arbuckle et Harold Lloyd surnagent. Lloyd interprétait un personnage à lunettes ('Glasses' après 'Lonesome Luke' des débuts), maladroit et malchanceux, conservant un entrain candide. Grandma's boy (1922) est un de ses nombreux films, impliquant sa consœur Mildred Davis (qui deviendra son épouse en 1923) et son collaborateur Hal Roach (scénario et production), comme toujours ou presque jusqu'en 1923 et 1924 (le fameux Safety Last/Monte là-dessus est dans ce cas).


Avec cet opus Lloyd se dépasse si bien qu'il crée un 'feature' film (long-métrage) par inadvertance. Le scénario est anormalement dense, le trouble du protagoniste curieusement épais. Grandma's Boy se pose comme une comédie familiale cherchant à émouvoir au-delà du gag, en multipliant les déviations de genre et les tendres anecdotes. La photographie et les lumières sont intéressantes notamment au départ – au-delà de ce que les moyens confortables (94.000$ de budget) permettent automatiquement. Le jeu face au miroir témoigne en un éclair de cette maîtrise. Lloyd est donc complètement entré dans le cinéma classique, par opposition à sa préhistoire et aux exécutions courantes. Un grand nombre d'aventures et d'antagonistes sont accumulés en gardant un rythme vif mais 'cool'.


Ces ajouts sont conséquents, un peu essorés ; l'organisation est brillante, la séance fluide. La matière comique est simple, peut-être efficace et pas si éloquente. Le niveau est gentil et futile, le registre insipide. La gaucherie du protagoniste est représentée de façon trop polie, ce qu'il s'autorise comme réactions grâce à l'amulette de sa grand-mère reste penaud à sa mesure (bastons/poursuites qu'il contourne, ou auxquelles il participe en planqué). Les gags sont souvent physiques, parfois un peu slapstick, prenant de l'envergure en fonction du travail sur la forme, la vitesse et l'implication (donc à leur plus fort lors de la poursuite en voiture). Le film contient également un peu d'humour animalier (les chatons) et des détails saugrenus, comme ce plan avec le canard parano.


https://zogarok.wordpress.com

Créée

le 4 nov. 2016

Critique lue 288 fois

Zogarok

Écrit par

Critique lue 288 fois

D'autres avis sur Le Petit à grand-maman

Le Petit à grand-maman
Aude_L
7

Charmant petit fils...euh, film.

Pas le meilleur Harold Lloyd, mais sans conteste un très attachant petit film avec une intrigue touchante et des œillades vers la jeune belle fille qui ne nous laissent jamais indifférents...

le 27 juil. 2022

Le Petit à grand-maman
YgorParizel
7

Critique de Le Petit à grand-maman par Ygor Parizel

Dans la longue liste des archétypes qu'Harold Lloyd a joué, celui-ci était peut-être bien celui qui possédait le plus de potentiel comique, le peureux et le lâche. Dans un premier temps, les auteurs...

le 5 févr. 2019

Le Petit à grand-maman
Zogarok
7

Humour nain, mise en scène brillante, détails saugrenus

Le comique muet a eu de nombreuses vedettes sur-actives, dont les plus éminentes sont Keaton et Chaplin. La plupart sont passées aux oubliettes, parfois même pour leurs contemporains, le public...

le 4 nov. 2016

Du même critique

La Haine
Zogarok
3

Les "bons" ploucs de banlieue

En 1995, Mathieu Kassovitz a ving-six ans, non pas seize. C'est pourtant à ce moment qu'il réalise La Haine. Il y montre la vie des banlieues, par le prisme de trois amis (un juif, un noir, un...

le 13 nov. 2013

49 j'aime

20

Kirikou et la Sorcière
Zogarok
10

Le pacificateur

C’est la métamorphose d’un nain intrépide, héros à contre-courant demandant au méchant de l’histoire pourquoi il s’obstine à camper cette position. Né par sa propre volonté et détenant déjà l’usage...

le 11 févr. 2015

48 j'aime

4

Les Visiteurs
Zogarok
9

Mysticisme folklo

L‘une des meilleures comédies françaises de tous les temps. Pas la plus légère, mais efficace et imaginative. Les Visiteurs a rassemblé près de 14 millions de spectateurs en salles en 1993,...

le 8 déc. 2014

31 j'aime

2