Avec Le Pianiste, on ne tombe ni dans le mélodrame du genre La Rafle, ni dans le gore pour le gore. Polanski est d'un réalisme crasse, parce que oui il faut avoir le coeur accroché, oui certaines scènes sont revoltantes, mais après tout, la guerre et la déportation, ce n'est pas la vie en rose !
De plus, la sagesse et quelquefois la passivité du héros dérangent. Il accepte sans broncher de devoir déménager dans le ghetto, propose ses services à des révolutionnaires sans avoir l'air d'être bien convaincu, et quand sa famille est jetée dans les trains de la mort, il ne se bat pas pour les suivre ou les sauver. Quand il s'agit de faire entrer des armes dans le ghetto, encore une fois, le pianiste travaille en toute discrétion. A peine note-t-on de temps à autre de la détresse dans ses yeux. Ce qui le porte tout au long du film c'est la musique, et elle porte aussi le film lui-même ! En effet, dès le début, on nous donne le ton : le héros joue une merveilleuse mélodie sous les bombardements.On comprend donc que l'atrocité sera ici quelque peu atténuée par la douceur du piano. Quant à la fin du film, c'est une apothéose musicale, l'air de dire "on met quelque chose de beau car il n'y a pas besoin de plus de malheur..."
En fait, ce qui caractérise Le Pianiste, c'est que le héros est un homme d'une intelligence remarquable qui a une longueur d'avance et qui a compris qu'il ne pouvait rien contre la machine sanguinaire nazie et le bourrage de crâne qu'elle use.