Le premier jour du reste de ta vie réunit beaucoup de caractéristiques du film français, certes, mais il possède de nombreuses forces, au point même de ne plus se réduire à la simple catégorie de " film français " qui n'a pas de sens et n'empêche pas un film d'être bon, quand il sait user correctement des codes et des techniques.
Correct est effectivement le mot. Le titre peut prêter à rire parce que justement, c'est un titre français, mais il propose de s'y arrêter et d'introduire l'identification à tous les personnages possibles du film. C'est une formule littéraire toute simple, qu'il suffisait de mettre en scène, et effectivement, tous les jours peuvent très bien être les premiers du reste de notre vie, et le slogan explique sans se cacher l'intérêt du film : " cette famille, c'est la vôtre ". Arrêtons de disserter sur l'identification, si c'est bien ou si c'est pas bien, le fait est qu'elle est réussie, et que, même pour ceux qui n'en ont rien à faire, elle n'empêche pas de ressentir les émotions et les forces de certains personnages. Les personnages sont des caractères de notre époque, mais rien de cliché, juste ce qu'il faut, le casting est excellent et le jeu est juste, de quoi redécouvrir Zabou Breitman et Jacques Gamblin qui peuvent se prêter à tous les rôles. On saluera la performance d'interpréter, pour les acteurs, et de tenir en 2h la durée d'une période de douze ans, au rythme bien mené, la première période agissant comme un prologue de bonne humeur et d'insouciance, la dernière comme un épilogue mélancolique et poétique qui ferait sortir quelques larmes, humbles, sincères. Si les personnages et la narration marchent, parce qu'elles font jouer l'imagination et l'identification chez n'importe qui, les situations restent extrêmement prévisibles et souvent peu subtiles. La fille qui découvre que sa mère a lu le journal intime, Papa et Maman qui se retrouvent dans un câlin après s'être questionnés sur leurs désirs, la voisine qui tombe amoureuse du jeune en lui ouvrant la porte parce qu'il fait trop de bruit… mais qu'importe, l'ensemble marche ! Le premier jour du reste de ta vie, c'est une fresque, c'est un gigantesque patchwork de moments simples, émouvants, généraux, arrivant à des personnages suffisamment normaux pour que le film soit crédible, et suffisamment forts pour que le film soit prenant. Du début à la fin, c'est l'illustration même d'une comédie dramatique, c'est-à-dire une œuvre menée par l'action, quelle qu'elle soit, au dénouement heureux, qui peut faire oublier tous les préjugés artistiques et la petite boîte dans laquelle on est enfermé.
Que ce soit Déborah François qui se retient de recracher le sperme de son copain devant ses beaux-parents ou la dernière image, qui, étrangement, n'est pas si prévisible, le film regorge d'instants importants, et le découpage en cinq journées, cinq petites périodes de vingt-quatre heures insignifiantes, sur une longueur de près de douze ans, témoigne que, bouts à bouts, les instants forment quelque chose et que, douze ans ou deux heures plus tard, n'importe qui peut se dire : " Waouh, j'ai déjà fait tout ça depuis le début de ma vie ".