Depuis sa retraite d’Evreux, Emile Beaufort (Jean Gabin), l’ancien et charismatique Président du Conseil rédige ses mémoires, l’occasion pour lui de se rappeler ces heures à la fois agitées et palpitantes lorsqu’il était dans les plus hautes sphères de la République. Le trio composé de Georges Simenon - d’après son roman éponyme - Henri Verneuil à la réalisation et Michel Audiard aux dialogues, nous offre avec “Le Président”, une incursion sans concession - à ce jour certainement l’une des meilleures que le cinéma nous ait donné - dans l’impitoyable et pourtant ô combien convoité sérail de la politique avec un grand “P”.
Qui d’autres que le grand Gabin, (“grand Gabin” étant un pléonasme en soi !) pouvait incarner cet ancien Premier ministre à l’intégrité et aux principes républicains chevillés au corps. Henri Verneuil nous le présente en homme d’Etat fourbu, mais d’une grande lucidité, au moment où il reçoit dans sa propriété, son homologue britannique, qui lui, est toujours en activité. Un simple prologue, mais qui met tout de suite en perspective l’ennemi intime de la politique, à savoir, la presse (écrite ou télévisuelle), que le réalisateur égratigne gentiment, en nous la dévoilant agglutinée aux grilles de la demeure de l’ancien Président, à l'affût du scoop ultime,
quant à l’intérieur, Beaufort et Sir Merryl Lord discutent d’écrevisses.
En effet, le long-métrage n’aura de cesse de montrer aux travers de cette histoire de crise politique, le rôle du journalisme. Situé avant le Traité de Rome - dans les souvenirs de Beaufort - avec en filigrane, les balbutiements des “Etats-Unis d’Europe”, déjà décriés et surtout, la nomination à la présidence du conseil de l’ancien bras droit de Beaufort, un certain Chalamon (Bernard Blier), Michel Audiard nous régale à grands renforts de salves verbales parcourant le long-métrage, comme autant de boulets rouges visant non pas le politique en tant qu’homme, mais l’institution et ses accointances ! Le monologue aux relents théâtraux de Gabin/Beaufort dans un hémicycle bouillonnant - résonnant comme une mort politique annoncé, mais surtout assumée - restera certainement comme l’unes des plus grandes prestations de l’acteur !
“Toutes ressemblances avec des événements ou des personnes existantes ne sont pas fortuites !”