Huit ans après le remarquable Serpico, Sidney Lumet s'intéresse à nouveau à la corruption au sein de la police avec Le Prince de New York, adaptation du livre de Robert Daley, lui-même s'étant inspiré d'une histoire vraie.
La force du Prince de New York se trouve en grande partie dans son personnage principal, dont Lumet dresse un portrait profond et surtout très complexe et ambigu, instaurant une atmosphère adéquate et posant de nombreuses questions autour de son caractère et ses ambitions. Il le rend intrigant, on ne sait d'abord guère que penser de lui, et montre par son biais ce qu'est l'humain, ses qualités et défauts et comment l'apparence peut être trompeuse.
Ce personnage est d'ailleurs bien entouré, chacun sachant ajouter sa pierre à l'édifice tandis que Lumet exploite avec brio cette grande qualité d'écriture. Il met bien en avant ce qu'est la machine juridique aux Etats-Unis, ainsi que son absurdité et ses failles tandis que le metteur en scène de 12 Hommes en Colère étudie aussi ce qu'est la police et ses représentants, le tout en mettant en place une ambiance réaliste et prenante, où l'on est immergé au cœur de New-York avec l'impression d'être au côté des personnages et au cœur de l'action.
Il démontre tout son talent avec un style âpre et naturaliste qu'il maîtrise avec brio, tandis qu'il mène à bien son récit, sachant bien le construire et y inclure la tension et les questionnements adéquats lors des bons moments, avec quelques séquences particulièrement mémorables. Il nous entraîne dans une spirale infernale où l'on va ressentir toute sorte de sensations, généralement les mêmes que le protagoniste (doute, colère, questionnement...) et ne nous laisse jamais indifférent. S'il est très bien entouré, c'est tout de même Treat Williams qui impressionne, dans un rôle pourtant compliqué mais où il parvient à retranscrire, finalement, ce qu'est un humain.
Cela fait déjà plus de 25 ans que Sidney Lumet s'interroge sur les institutions et la démocratie de son pays, Le Prince de New-York, comme d'autres avant lui, en est un remarquable exemple, et il en ressort une oeuvre aussi riche que passionnante et sujette à de nombreux questionnements et sensations.