Icare

Pour nous calmer lorsque nous étions enfants, mon père nous disait souvent avant de quitter pour la soirée : « Ce soir il y a un bon film de Burt Lancaster à la télévision. » La fois que je l’ai pris au mot, il y avait effectivement Le prisonnier d’Alcatraz à l’horaire. Je fus séduit. Une histoire simple dont le héros est isolé derrière les barreaux par un méchant directeur de prison qui veut le punir à tout jamais. Pour un enfant, il y a surtout un homme qui prend soin et se fait ami des oiseaux. Robert Stroud, fils unique protégé jalousement par sa mère, développe un caractère impulsif qui le pousse un jour à tuer l’agresseur de sa petite amie et plus tard un vieux gardien de prison malveillant. L’arrivée dans sa vie d’un moineau nouveau-né va changer le cours de sa détention. La sagesse va se frayer en lui. Une complicité naîtra entre son geôlier et lui. Il héritera des canaris des autre détenus, il les fera s’accoupler, les soignera, étudiera leur morphologie, inventera un médicament, écrira un livre, une admiratrice l’épousera. Au cœur de ce film, il y la notion de résilience. Contre la détermination du directeur du pénitencier à lui rendre l’existence pénible en l’isolant, Robert Stroud lui oppose l’acceptation de son sort et l’occupation brillante de son temps. Quand Schoemaker le sépare cruellement de ses volatiles en le transférant à Alacatraz, Stroud réplique en rédigeant une brique remet-tant en question le système carcéral. La réalisation John Frankenheimer sert bien le propos. L’interprétation sobre et intelligente de Burt Lancaster rend hommage à l’estime que lui portait mon père.