Nous pouvons tromper la Vie avec la Mort, mais l’inverse est impossible.

Si la Mort décide de sortir de son étrange renfoncement montagneux, soyez surs qu’il y a une excellente raison. Si elle pense que votre heure est venue, ne la contredisez pas, cela ne servira à rien. La Mort est une bombe à retardement, nous pouvons la ralentir, mais pas la stopper. C’est dans cette optique qu’Antonius Block se lance dans une partie d’échec avec elle, sa vie n’est pas totalement accomplie, mais il s’efforce de corriger cela. Il se lance donc dans une partie d’échec qu’il sait vouée à l’échec.

Ici, c’est un monde ravagé intérieurement, la Mort y est omniprésente, indirectement, cependant personne n’ose l’affronter. La peur de l’inconnu remplace la volonté du pardon divin, l’Homme fuit comme un lâche, tel un canard à qui on a promis le bouillon. La Mort semble, pour le peuple, plus influente que Dieu. Un monde terriblement déprimant et vain, à tel point qu’on se réjouit à la simple vu d’un nouveau-né ou de quelques fraises sauvages. Les petits plaisirs prennent la place des gros, et les gros disparaissent.

Retrouver sa femme, connaître les joies de la vie une dernière fois avant que la Mort nous emporte, espoir honorable, et réalisable, car la Mort, à défaut d’être inévitable tel un bus dans une ruelle ou un John Goodman sur une piste de bowling, demeure indulgente.
Mais attention, si elle estime que vous faites trop durer, que vous poussez le bouchon, elle viendra vous chercher, que vous soyez sur une plage, dans un arbre ou sur vos chiottes. Elle s’en fout. C’est la Mort après tout.
Ingmar le savait, il savait que la Mort viendrait le chercher un jour ou l’autre, comme tout le monde. Certains l’affrontent, d’autres la fuient, elle révèle la vraie nature de l’Homme.
Après tout, la Mort n’est elle pas humaine ? L’image que Bergman nous en donne reflète pourtant celle d’un humain : un homme vicieux, tricheur et menteur, la Mort n’est en aucun cas honnête.
En y pensant, Antonius et la Mort sont presque semblables, en omettant leurs buts opposés : faire durer sa vie pour Antonius, et pour la Mort, l’arrêter.

L’ode à la destiné de Bergman prend tout son sens lorsqu’elle met en scène des éléments rappelant la vie, la joie et l’espoir (le bébé, les spectacles comiques) dans un monde au dessus duquel plane la mort, comme un vautour au dessus de sa proie.

Un voyage funèbre d’une roulotte poursuivie par le pire traqueur qui soit, une valse éminente entre la vie et la mort, entre le refus de l’inévitable et la foi, entre la joie et la peine. La Mort ne lâche jamais personne, et ça ne changera jamais, alors pourquoi résister, laissons nous aller, laissons nous embarquer, après tout, la Mort vient bien de quelque part, une vie après la mort, un certaine espoir nouveau, que ce monde sera meilleur que le précédent.

Un Hymne magnifique au septième art, le Septième Sceau s’est ouvert, et mon cœur aussi.
B0mbii
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le 22 août 2014

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B0mbii

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