"Vivre parmi tous ces gens aimables qui ne vous demandent que de dissimuler vos pensées."

A travers une histoire romantique et tourmentée dans le New York des années 1870, Martin Scorsese fait le constat d'une époque où règnent les apparences sur la pensée individuelle.


Le cinéma qui met en scène une époque précise, n'est pas le plus facile à aborder. D'une part car il faut savoir être authentique sans tomber totalement dans la démonstration, mais aussi par ce qu'il faut parvenir à instaurer une trame narrative intéressante. Sur le papier il faut avouer que Le Temps de l'Innocence n'a rien d'une fresque romanesque, et ce n'est pas ce qu'est le film de toute façon. Pourtant il s'agit-là d'un long-métrage magnifique et captivant, malgré sa lenteur et l'approche presque conventionnelle du sujet. Scorsese parvient à saisir l'essence de cette romance impossible, il devient poète et offre à ses acteurs des rôles somptueux.
Le film nous invite à l'étude d'un microcosme bourgeois, avec son lot de convenances et rituels, un monde où il ne fallait pas être, mais paraître. A travers le personnage de Daniel Day-Lewis, le réalisateur rend hommage au besoin de liberté qui incombe à chaque être humain. L'amour est ici une voie sans issue, les choix sont les régisseurs d'une existence déjà toute tracée.


Visuellement le film est magnifique, cette beauté vient faire échos à la grâce mélancolique qui émane de cette histoire. Grâce aux interprétations grandioses de Day-Lewis et Michelle Pfeiffer, qui éclipsent presque la candide Winona Ryder, une vraie tension s'instaure et propose au spectateur de regarder le film non pas comme une simple histoire d'amour tragique, mais bien comme une œuvre profonde sur la psyché humaine et les sentiments. La particularité du film, réside aussi dans son absence de manichéisme. Aucun personnage ne peut vraiment prétendre à être antipathique, ils évoluent tous dans un univers où le libre-arbitre n'existe pas. Un peu comme dans ses films de gangsters, Scorsese nous fait aimer des personnages aux actes parfois douteux, et c'est ce qui les rend justement beaux.
La musique a également une place importante, les compositions viennent survoler une mise en scène puissante, les jeux de regard, les gestes, les plans larges sur les grands espaces autant que sur les intérieurs plus confinés, Scorsese aime son sujet et sait l'aborder.


C'est un film très fort et poignant que présente ici le réalisateur de Taxi Driver. Totalement maître de son art, il signe une oeuvre qui marque le spectateur de manière indélébile.

E-Stark
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le 29 juin 2014

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E-Stark

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