Malgré un script qui prête à l’émotion facile, Le temps qui reste n’est pas un esclandre féroce et militant qui glorifie le bonheur de vivre contre vents et marrées. Non sans subtilité, le talent de François Ozon est de montrer avec humilité, l’acceptation progressive d’une mort prochaine qui arrive plus vite que prévu. Filmer avec modestie ce temps qui reste, voilà l’unique et seule ambition. Un récit initiatique court pour toucher du doigt, un sentiment difficile à atteindre : la sérénité. Les métastases sont diffuses, c’est inopérable. Le couperet est tombé et le suspense a disparu. Romain, photographe trentenaire, comprend qu’il ne lui reste que quelques mois à vivre.
L’originalité du film, s’il en a une, ne provient pas de son postulat de départ mais plus de son traitement qui fait foi d’une simplicité adéquate rendant encore plus émouvante la finalité du cheminement intérieur. François Ozon ne porte pas d’intérêt particulier aux causes de la maladie. Sans morbidité théorique ou picturale, il préfère s’attacher à décortiquer les vicissitudes d’un Melvil Poupaud, au jeu d’acteur parfait, tout en variation. C’est alors que ressurgissent quelques réminiscences du passé à travers son miroir d’enfant. Elles ne viennent pas le hanter mais le conforter dans sa manière d’aborder la mort. Lui qui n’aime pas les enfants. Ou qui n’a pas aimé être un enfant. Un rapport à l’enfance qui est l’épicentre du film. Un homme qui meurt, et qui a entre les mains le pouvoir de donner la vie à un couple stérile. Drôle de destin. Chienne de vie ou possible revanche.
Le temps qui reste ne s’inscrit pas dans un genre de film fortuit qui voit son personnage s’accrocher médicalement à la vie tant bien que mal ou partir au bout du monde pour profiter au maximum de ses derniers souffles. Non, François Ozon tant dans sa démarche visuelle que narrative se démarque de toute envolés lyriques ankylosantes pour laisser filtrer un sentiment de plénitude solitaire. Un coup de téléphone à une sœur en plein malaise, une photographie prise sur le fait accompli, une accolade avec son père, un bouquet de rose avec sa grand-mère. C’est tout. Bien évidemment, la tristesse est là, la responsabilité de partir sans crier gare est difficile à admettre.
La caméra de François Ozon sait trouver la bonne distance avec son propre personnage. C’est là, toute la beauté d’une œuvre qui recherche presque l’anonymat, voulant faire le vide autour de soi, pour trouver la paix. Le temps qui reste ne demande pas chez le spectateur un attachement particulier pour son personnage parfois antipathique, qui crie autant qu’il pleure, mais est plus à la recherche d’une identification opportune. Celle de tout un chacun devant l’inéluctable. Romain préfère regarder la mort en face, non sans mal et période de doute surtout auprès de l’homme qui l’aime. Il voudra lui faire l’amour une dernière fois, après l’avoir quitté sans lui avoir annoncé la nouvelle.
Mais à quoi bon ?
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.