Après avoir regardé plusieurs courts-métrages des frères Lumière et de leurs opérateurs ainsi que quelques tours façon Méliès à l’aube du vingtième siècle, une œuvre mémorable a retenu mon attention. Certes, l’influence du cinéma m’a poussé à m’y arrêter car il est impossible de ne pas la mentionner lorsqu’on s’apprête à retracer l’histoire de la pellicule cinéma. Il s’agit bien évidemment du Voyage dans la lune (1902) du magicien Méliès. Pourquoi cette œuvre-là a marqué les esprits ? Tout simplement par sa mise en scène, proposant déjà une histoire complète d’une dizaine de minutes avec décors, figurations et surtout effets spéciaux dont Méliès est devenu le maître incontesté.
Outre l’aspect science-fiction qui marquera ce court-métrage et qui animera l’imagination et la curiosité de beaucoup de spectateurs, plusieurs trucs et astuces en émaneront. Je citerai parmi eux les fondus enchainés, l’apparition ou disparition de personnages ou d’éléments du décor ou encore ce « faux-travelling » dont Méliès raffole et qu’il met en scène déjà dans ses plus petits métrages (L’homme en tête de caoutchouc, 1902), bien que la caméra restera fixe.
Inspiré des œuvres de Wells et de Jules Verne, il n’est pas étonnant de voir une telle idolâtrie pour la lune et tous les aspects astronomiques. Méliès revêt alors de l’imaginaire dans son œuvre en créant plusieurs éléments de décors étonnants (la fusée, le laboratoire ou simplement la verdure et le temple de la lune).
Malgré toutes ces innovations techniques, on remarque encore beaucoup de naïveté dans l’approche cinéma à cette époque : les savants sont des magiciens reconnaissables avec leurs chapeaux, la lune a un visage, etc. Méliès traduit également le contexte historique de l’époque via les extra-terrestres de la lune, considérés et traités comme une tribu indigène. Cette idée reçue provient de la colonisation encore très en vogue au début du vingtième siècle et transmet une supériorité de l’homme blanc, à défaut de l’Europe entière. Ainsi, ce film fictionnel transmet des données documentaires intéressantes et non négligeables à sa compréhension – comme la majorité des œuvres cinématographiques.