S’il fallait briller un seul instant, ce serait avec “Gold”, mais cela ne veut pas dire pour autant que Stephen Gaghan n’a pas sombré dans des rouages qu’il ne contrôle plus ou à peine. Chez Universal, c’est aussi laborieux que le major d’Hollywood, mais il faut croire que l’erreur de parcours vient de ce projet, loin d’être intimiste et pertinente. Que ce soit sur le plan humoristique ou fantastique, l’alchimie ne prend pas un seul instant et c’est ainsi que nous enfilons maladroitement le costume du malaise ou de l'insouciance. Ce n’est pas seulement dans l’interprétation du personnage phare ou le scénario faiblard de ce dernier essai qu’on trouvera des reproches, mais sur l’ensemble d’une désastreuse production, qui de toute évidence n’arrive pas à la cheville de celui porté à l’écran par Eddie Murphy (1998) et encore moins par celui d’un grand Rex Harrison (1967).


Il faut une vedette pour rendre l’illusion divertissante, sur le principe toutefois. Après avoir troqué son armure contre un pyjama de luxe, Robert Downey Jr. semble bien embêter dans un rôle sans doute trop léger et pas assez extravagant. Dans une Angleterre dévêtue de sa noblesse, d’une sagesse qui s’égare dans les pattes d’animaux de synthèse, la vocation de ce long-métrage reste confuse et ne semble jamais vouloir orienter les voiles dans la même direction. Pas de symbiose entre les doublages et les animaux, beaucoup de maladresses dans l'interaction entre les comédiens et ce bestiaire numérique à en vomir du pixel. Si le principal intérêt sombre avec ces créatures qui manque de justesse, il ne reste plus grand chose à se mettre sous la dent. Et pourtant, il y aurait sans doute eu de meilleures idées qui ont été scellées dans un tiroir. Certaines personnalités ne dépassent pas le comique de répétition ou le gag que l’on fait à un enfant qui ne cherche pas l’exigence. Mais à force de jongler avec les facilités scénaristiques et d’écriture, on en oublie ce qui fait la force des personnages. Sans pilier, pas de structure et sans structure, pas de cohérence.


Les rôles secondaires passent donc à la trappe, à commencer par l’apprenti Harry Collett, missionné par une croyance mystique, mais qui ne s’oppose pas à la violence pour autant. L’imaginaire de ce garçon est un signe de clairvoyance que l’on néglige à tort et cela se ressent de bout en bout, car il n’est présent que pour servir l’intérêt de jeunes spectateurs qui s'identifient… s’ils y parviennent. De même, Antonio Banderas a finalement vaincu son traumatisme chez Almodóvar pour venir flirter avec un pseudo-antagoniste, encore une fois sans briser des murs. Quant à Michael Sheen, il est surprenamment suffisant et limité, tout comme Jessie Buckley qui n’a pas décollé de son support douillet. Que faut-il donc retenir de cette exploration qui usent abondamment de tremplins et de mauvaises décisions de réécritures ? Hélas, uniquement des maladresses, si grossières qu’on finit par nous achever avec un accent britannique sans saveur, pour ne pas dire odieux.


“Le Voyage du Dr Dolittle” est donc un conte qui n’a pas confiance en ses propos et qui survole ce qui aurait pu adoucir cette peine post visionnage. La réalisation est d’une fadeur, à l’image des voix-off dont on abuse. On surexplique à outrance et on laisse le traumatisme du docteur Dolittle en arrière-plan, sans non plus le lié à l’arrivée inattendue de Tommy. On juxtapose tout, avec des ellipses qui dérègle le rythme. Pas de retour concluant donc, pour le célèbre vétérinaire qui a beau savoir communiquer sur le papier, mais qui bégaye énormément, chose qu’on ne montre pas aux enfants même pour passer le temps.

Cinememories
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le 14 févr. 2020

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