Pour une fois que l’ascenseur n'est pas en panne ...

Sous son air négligé, sa parlotte généreuse et l’apathie totale d’un Charles Bronson encore moins expressif que d’habitude, Le cercle noir est avant tout un pur produit de son époque; il en porte en effet tous les gimmicks : une violence craspec, un regard on ne peut plus corrosif sur la société américaine et des punchlines fleuries qui feront le bonheur des amateurs de verbe inspiré.

Surfant sur le succès de l’Inspecteur Harry qui avait remué le cœur fragile des ménagères américaines 3 ans auparavant, cette troisième collaboration Bronson/Winner donne l'impression d’être un galop d’essai au futur succès qui les réunira l’année suivante : un justicier dans la ville.
Terrain d'expérimentation, mais surtout l’occasion pour le cinéaste d’étancher une soif revendicatrice inaltérable, qu’il hurle jusqu’à manquer d’air, jusqu’à surtout négliger son récit. Comme si Le cercle noir était pour lui, en premier lieu, un moyen de vider son sac, de crier au monde ce qu’il a sur le cœur. Réflexion acide sur le Vietnam, remise en question de l’implication des forces de l’ordre —TOUS les flics sont des feignasses de première, y compris Bronson, mono-expressif, qui n’aime son boulot que parce qu’il peut y buter du vilain—, bilan amer sur la question raciale, petit coup de latte derrière la nuque du mouvement hippie, le bougre ne manque pas de sujets de contrariété.
Cette verve intarissable, si elle est à l’origine du chaos qui caractérise malheureusement Le cercle noir, lui permet toutefois de s’inscrire avec véhémence dans la vague dénonciatrice du nouvel Hollywood.

Pour le reste, il faudra être friand, et de l’époque, et de Bronson, pour s’amuser de cette histoire de guerres mafieuses un peu laborieuse, mais agréable à suivre tout de même. Winner ne joue pas les radins, fait exploser le bodycount plus que de raison et transforme son protagoniste en un robocop sans armure qui ne connaît pas la peur. En outre, il ne recule devant aucun effet de mise en scène, quitte à faire virer chaque massacre dans une exagération outrancière, qui fait autant sourire qu’elle semble fort décalée, à l’image de ce mafioso qui se la joue 9 Septembre, 40 ans plus tôt, pour une chute de quelques étages du plus mauvais effet (mais on rigole !).

Bref, si les 70’s font partie de votre came privilégiée, que vous aimez les polars en roue libre qui n’hésitent pas à faire tomber les corps sans raison valable, et que les moustachus musclés vous font vibrer les mirettes, vous pouvez vous réserver le cercle noir pour une séance nobrain qui vous filera au moins le sourire, à défaut de vous servir de référence lors d’un futur dîner culture avec beau-papa.
oso
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le 25 oct. 2014

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