Le Vent Se Lève... Le spectateur déçu également...
Pour n’importe quel grand amateur de cinéma d’animation Japonaise, voire de cinéma tout court, le nom de Miyazaki ne peut que faire frémir. Malgré certains projets mineurs, tels un « Ponyo » beaucoup trop enfantin et co-scénarisation du très moyen « La Colline Aux Coquelicots », l’excitation d’une nouvelle sortie de sa part reste toujours présente. Sa dernière réalisation avant son départ en retraite devait alors malheureusement remplir un rôle très difficile : Celui de la dernière grande révérence d’un génie artistique dans le meilleur des cas, ou alors celui d’un film testament doux amer dans une hypothèse moindre.
Cette fois ci, Miyazaki délaisse ses univers fantastiques et de fantasy, au profil d’un biopic sur l’ingénieur aéronautique Japonais Jirō Horikoshi. En essayant, pour une fois, de changer complétement de registre, Miyazaki fait preuve d’une audace admirable. En effet, si l’on excepte certaines scènes de rêve, ce film est son premier à s’ancrer intégralement dans un univers réaliste.
Malheureusement, c’est bien là que les ennuis commencent. Dans ses films fantastiques/fantasy, les scénarios contenaient énormément de passages très étranges (pour ne pas dire WTF). Mais ces derniers, en plus d’être chargés en portée symbolique, étaient tous cohérents par rapport à l’univers présenté. Cette étrangeté laissait place à l’onirisme et soulignait la beauté du récit. Ici, même si il n’a pas hésité à lourdement romancer, en s’ancrant dans un univers réaliste, le film se devait d’être jugé tel quel…
Et là, le scénario ne passe pas, la faute à de trop nombreuses incohérences (Paye tes services secrets Japonais qui ne sont même pas foutus de chercher leur « cible n°1 » plus de 2 secondes. Ou encore le fait que tous les Japonais d’un hôtel chantent parfaitement l’Allemand). Le film ne s’attarde jamais là où il faut également. On ne s’attache aucunement à la relation entre Jirō et sa compagne, de par le montage mais également via des situations surréalistes (quand il fume à côté d’elle alors qu’elle est malade et alitée. Qu’importe le symbole, c’est juste affligeant). Pire. Miyazaki a carrément réussi à ne pas me faire m’intéresser à son sujet de base : l’aviation. Naïf, mais paradoxalement trop terre à terre, les longueurs et l’ennui se font vite sentir. Et c’est bien dommage.
Seul un détail sur l’histoire est intéressant : Le film a eu au moins pour lui de ne pas juger le héros concernant son aide et sa collaboration avec l’armée Allemande qui aurait transformé le film en point de vue historique moraliste putassier. Ici, seul compte Jirō et sa passion illimité de l’aviation. Et ce n’est, au final, pas plus mal. Voire intelligent.
Dans la forme aussi, les intentions sont curieuses. L’idée d’une très grande partie des bruitages effectués à la bouche était très intéressante sur le papier, afin de renforcer le ressenti et le point de vue du personnage principal. Ainsi, même si le séisme du début de film est bruité façon « Godzilla arrive et attaque la ville », l’intention est là, donc je peux passer outre. En revanche, un ressort qui, en se tordant, fait un bruit de pet, ça ne passe pas, ça ne fonctionne pas… De même, certains détails visuels forts curieux qui laissent perplexes (la pupille en forme de bombe des personnages Allemands… Probablement volontaire, mais maladroit).
Miyazaki restera toujours dans mon cœur de cinéphile avec ses films marquants d’autrefois (Mononoke, Chihiro, Totoro, Le Château Ambulant…). Mais au final, sa retraite ne m’attriste pas tant que ça, étant donné que je pense qu’il a déjà tout dit, mais aussi car il a signé avec son film une vision douce et mélancolique de la vie (de la sienne?), mais trop maladroite et creuse à mon goût. Le studio Ghibli a encore de belles heures devant lui, avec ou sans le maitre.