Je dois m’attaquer à un Oscar de la meilleure photographie pour dire que Légendes d’automne est par endroits aussi mauvais que la traduction de son titre : ce n’était pas de la ”fall” automnale mais de la chute biblique qu’il s’agissait.


Remarquons que le regard torve jeté sur des nuages des Plaines toujours semblables dans leurs contrastes épars fait effectivement penser à l’étude saisonnière, et par conséquent épisodique, de ces paysages sur lesquels reposent tant de choses. Chacune des ces nuées écharpées peut à tout moment s’étaler dans le ciel et devenir orage. Pour la plus grande joie du créateur.


Décalé dans le langage, emprunté dans les mouvements, emberlificoté dans les sourires passe-partout de Julia Ormond, cadré au plus offrant, Legends of the Fall semble compenser le peu de matière dont il est tiré – une nouvelle – en fourrant de la télévisualité de ci de là pour se donner de l’épaisseur et absorber les senteurs nostalgiques les plus tenaces des centaines de westerns l’ayant précédé. Et il faut dire qu’on a l’olfactif bien imaginairement titillé à force de côtoyer les accessoires. Le visionnage a ce mérite de bien mûrir en esprit.


Abondamment guidé par la voix off qui essaye de faire sortir de terre des émotions sans envergure, le film brasse les hauts et les bas de la vie de trois frères en n’amenant guère plus d’un mouvement ; un bruit de pas ne signifiera pas pour les personnages que quelqu’un approche, et l’on se servira des personnages secondaires non comme d’apports ponctuels mais, sous forme d’inserts, comme moyen de ralentir une scène qu’on ne veut pas poignante trop vite. Une chose à la fois ? Ça ne marche pas vraiment comme ça.


Les cascades trouvent difficilement une place qui ne fasse pas dire : « et bien, ils tenaient à montrer qu’ils maîtrisaient les chutes de cheval ». L’honneur est sauf grâce à la dimension du scénario, sur l’échelle modeste d’une vie épique, qui finit immanquablement par convaincre de sa force. En cela, un merci va à Hopkins, toujours si ferme à l’écran qu’il semble impossible qu’on pût lui « donner » un rôle. L’émulsion finit par envahir l’univers malgré la disposition ultra-classique du bon, de la brute et du truand surjouant le gymkhana fraternel.


Quantième Art

EowynCwper
6
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le 8 juil. 2019

Critique lue 178 fois

Eowyn Cwper

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