Il faut le reconnaître, les 4 Fantastiques et le grand écran semblent à première vue irréconciliables. Porté par les frêles épaules du sans doute trop jeune Josh Trank (Chronicle), ce reboot qui disons-le franchement n'avait rien de nécessaire, échoue à redonner de l'éclat à une des équipes les plus emblématiques de l'écurie Marvel Comics. Pire que ça, il remet en perspective le four critique des deux volets des années 2000 : après tout n'y avait-il pas quelque chose de sympathique dans ces séries B à gros budgets, absolument kitschs et non crédibles ? Peut-être bien, en tout cas y avait-il une substance, quelque chose qu'on pouvait détester, dont on pouvait se moquer. Quand la version 2005 quant à elle n'a absolument aucun intérêt, ou presque. Constat d'échec, en 4 points, bien entendu.
Double identité
Il crève les yeux que Josh Trank n'a pas su s'imposer face aux studios. Ce constat seul ne suffit ni à expliquer ni à justifier tous les défauts du film, mais il le rend bancal dés son écriture et ses intentions. La promesse de Trank semblait être celle d'une origine story sombre et violente, lorgnant sur Batman Begins de Nolan, et bien sûr sur Chronicle. Après tout l'histoire de jeunes confrontés à leurs pouvoirs, Josh Trank l'a déjà raconté, et assez brillamment d'ailleurs.
Aussi le film a-t-il ses côtés dark très appréciables (la famille de Ben Grimm, sa casse automobile absolument glauque, la scène de découverte des pouvoirs, la douleur de la future Chose face à sa transformation), mais ils sont immédiatement désamorcés par un cut ou par l'intrigue « principale » contre Fatalis. C'est donc autant de pistes scénaristiques qu'on devine dessinées par Trank qui tombent à l'eau.
On échoue alors à être vraiment impliqué, mais l'ambiance reste suffisamment lourde pour nous empêcher de rire aux rares tentatives d'humour Marvel. A ne pas choisir entre la voie Dark Knight et la voie Avengers, le film se recouvre de cette double identité, et n'a donc pas d'identité du tout.
Une origine story d'une heure trois quart
Le film souffre également du syndrome Amazing Spiderman. A savoir une volonté de rebooter proprement la licence et de minutieusement recréer un univers. Quitte à en faire des tonnes et à refaire ce que tout le monde sait déjà : on sait qu'ils vont acquérir leurs pouvoirs et on sait comment. Au final, le film n'en devient qu'une origine story bien trop longue, et le méchant apparaît comme inutile à la construction du groupe. Fatalis n'est là que pour remplir le cahier des charges et pour un peu d'action – le film en manquant cruellement.
La fausse bonne idée du casting modernisé
Loin de moi l'idée de rejoindre l'aréopage de trolls et de crétins racistoïdes qui ont critiqué le choix d'un acteur afro-américain pour jouer la Torche humaine, juste parce que « bouh mais il est pas noir dans les comicseuh ». Sauf que celui-ci est le frère de Suzanne Storm, donc techniquement si celui-ci est noir, elle aussi. Au passage cela ne poserait aucun problème, quitte à changer le casting et à le moderniser, autant aller jusqu'au bout. Sauf que non, le studio a rempli son quota de minorité visible, ¼ des Fantastic Four qui n'est pas blanc, c'est déjà beaucoup, donc la Femme invisible sera blanche – jouée par Kate Mara, décevante – et pour justifier cela, on dira qu'elle vient du Kosovo et qu'elle a été adoptée.
Voilà comment on obtient un background totalement inutile à l'intrigue mais obligatoire pour expliquer que les deux enfants ne soient pas de la même couleur... Autant de complications pour avoir un casting moderne, mais pas trop, faut pas déconner, c'est un blockbuster.
Plus largement, le casting soit-disant ados ne passe pas – Milles Teller et Kate Mara font bien plus vieux, et pas 17 ans. D'ailleurs, en parlant de 17 ans, le fait qu'ils soient très jeunes oblige à développer un background de scientifiques quand ils étaient enfants. Ainsi, Red Richards a inventé le téléporteur transdimentionnel à 10 ans. Et après vous voulez être crédibles et sombres, vous voulez la jouer hard science, à la Interstellar, avec votre Zone Zéro ?
Pour finir, comment rater son méchant
C'est très simple. Vous créez un personnage un peu badass à la va-vite, vous le faîtes disparaître la moitié du film, puis vous le faîtes revenir à la fin avec un objectif de destruction de la Terre qui vient de nulle part, parce que, ah oui, faudrait qu'il y ait des scènes de combats quand même.
Et vous donnez à Fatalis des pouvoirs improbables, sans expliquer leur nature. C'est peut-être ce loupé sur un des méchants avec le plus de potentiel qui fini d'acter l'échec du film.
Bref, on en regarderait presque à nouveau la Chose en carton pâte de 2005, pour se consoler.
Presque, hein.