J'aime bien l'humour de Tarantino : pour son huitième film il fait un huis clos, comme son premier film, ce qui fait que la boucle est bouclée...


Alors, si on veut pinailler on peut dire que Les 8 Salopards n'est pas un véritable huis clos car il ne se passe pas entièrement dans l'auberge. En effet, le film bénéficie d'une ouverture plutôt longue qui présente petit à petit quatre personnages, histoire que le spectateur ait déjà des repères lorsque l'attelage arrive à la mercerie de Minnie. En plaçant dès le départ ses protagonistes dans une petite diligence propice aux discussions et donc à l’établissement des enjeux, Tarantino prend soin d'établir le thème de l'enfermement, dont l'ampleur est démultipliée par ces magnifiques paysages enneigés, où le ciel et la terre ne font qu'un.


Bien qu'une très grosse partie de l'intrigue se passe dans l'auberge, le réalisateur n'a pas voulu mettre de côté l'aspect météorologique de son long-métrage. De ce fait, à la manière de Crimson Peak, la neige s'invite très souvent à l'intérieur. Accompagnée de la lumière bleue qui vient de l’extérieur, elle vient sublimer une image où le bleu et le jaune semblent vivre en symbiose. Le cadre, quant à lui, est très large et englobe une grande partie de l'espace, ce qui témoigne du fait que les personnages doivent communiquer entre eux pour faire avancer l'intrigue.


Et pour communiquer, ils communiquent ! J'avais oublié à quel point Tarantino est un bon dialoguiste, et c'est particulièrement visible dans ce film. Les scènes proposées s'étirent et s'étirent jusqu'à en devenir presque interminable, et pourtant cela reste fascinant grâce aux échanges verbaux des salopards. C'est véritablement la clé de voute du long-métrage (ou tout du moins, de la première partie). Logiquement, l'écriture dans sa globalité bénéficie du même soin. Les enjeux se mettent en place dans l'ombre puis sont dévoilés d'un seul coup, par un retournement de situation toujours inattendu mais jamais forcé (je pense au moment génial où, juste après avoir pris une grosse claque avec un élément qui concerne Marquis Warren, on apprend que quelque chose de tout aussi monumental se profile avec Daisy Domergue). Les acteurs sont visiblement à fond dans l'histoire et livrent tous un prestation impeccable, en particulier Jennifer Jason Leigh qui m'a estomaqué tant son personnage est à la fois crédible et écœurant.


Ce déluge de gore et de futures répliques cultes est complètement jouissif, mais j'ai quand même quelques réserves concernant la musique d'Ennio Morricone. Je trouve ses compositions épatantes, surtout la première musique monumentale qui ouvre l'histoire, mais Tarantino les utilise sporadiquement dans le film. La plupart du temps, il laisse les protagonistes se disputer avec pour seul accompagnement le vent qui mugit, ce qui fait que selon moi, la présence du compositeur au générique ne devrait pas être autant un argument de vente.


Django Unchained m'avait laissé sur ma faim, je suis content de voir que Tarantino a encore beaucoup de choses à nous montrer à travers le western. Comme à son habitude il signe un délire cinématographique maîtrisé, à l’exception que celui-ci ne met en scène ni des gentils, ni des méchants, juste des salopards.

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le 7 janv. 2016

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