Cette séquence est entièrement tirée de faits réel et a été réalisée par une professionnelle, ne la reproduisez en aucun cas chez vous.


PEGI 18




Séquence 1
INTÉRIEUR - NUIT - GUICHET D'UN CINÉMA


Deux hommes s'avancent vers le guichet tenu par une jeune femme souriante


LOÏC
Bonjour, une place pour Les Huit Salopards en tarif étudiant s'il vous plait.


GUICHETIERE
Bonjour, il n'y a pas de tarif étudiant le week-end.


LOÏC
Je m'y attendais un peu. Ce qui nous fait ?


GUICHETIERE
11,70€ s'il vous plait.


Loïc déglutit rapidement puis devient rouge.


LOÏC
QUOI ?!


GUICHETIERE
Je suis navrée... Sinon vous devriez aller en semaine au MK2 bibliothèque, les ta...


LOÏC
Les tarifs sont moins chers pour les moins de 26 ans, oui. Mais je n'ai pas eu le temps d'y aller en semaine depuis sa sortie, malheureusement. Tant pis, je suis venu pour le voir, je prends la place !


GUICHETIERE
Très bien.


LOÏC En même temps, le film est en fin de vie au cinéma, les séances ne sont plus très nombreuses.


Il paye. Elle lui donne le ticket de caisse et la place.


GUICHETIERE
Il est en fin de vie, parce qu'à la fin ils meurent tous !


Elle fixe Loïc dans les yeux.
Loïc la fixe à son tour.
Elle rit aux éclats.
Loïc rit aux éclats aussi.
Le jeune homme qui accompagne Loïc suffoque soudainement.
Loïc continue de rire, jaune.
Elle rougit, se rendant compte de la boulette de compétition olympique qu'elle vient de faire.


GUICHETIERE
Oups... :/


LOÏC
11,70€, ça comprenait l'assurance anti-spoil c'est bien ça ?


Loïc continue à rire, toujours jaune.
L'homme qui l'accompagne suffoque de nouveau.
Ils se dirigent maintenant vers la salle.
Une larme coule lentement sur la joue de Loïc.


FIN




NB: le titre originel a du être changé après que le CSA et les associations féministes aient censuré "Les huit salopards et la grognasse"




Voilà un mois que le dernier Tarantino était sorti lorsque j'ai enfin daigné aller le voir. Une quasi hérésie en tant que fan de Tarantino et de Cinéma. Parce que oui, Tarantino est un des plus grands fers de lance actuels du Cinéma, avec Wes Anderson et David Fincher. Je vous vois arriver avec vos grands sabots, alors j'entends par là qu'il réconcilie aisément cinéphiles et grand public, mêlant à merveille sens artistique et divertissement, s'inspirant des plus grands tout en modernisant son art.


Prenant le bon côté des choses, je m'estimais donc heureux de connaître la fin avec les 300 autres personnes assises à mes côtés, ces pauvres ignares. Quelle joie ! Ajoutons à cela un chauffage poussé à son maximum trois heures durant dans une salle pleine à craquer et c'est un bingo ! (c'est comme ça qu'on dit, "c'est un bingo" ?) C'est à se demander si les spectateurs qui quittaient la salle le faisaient en opposition au style tarantinesque ou bien par peur de la crise cardiaque. Sans doute un peu des deux. Toujours est-il qu'avec cette histoire, j'avais la chance inouïe de ne plus avoir à me concentrer sur l'histoire mais bien plus sur tout le reste du film, que ce soit l'ambiance, la réalisation, la musique et surtout les références et influences de Quentin, veinard que je suis !


Quid des salopards ? Il est indéniable que Tarantino livre ici son film le plus mature. Si les 7 autres films que nous a livrés QT jusque là étaient des plus accessibles, il prenait un virage plutôt serré avec ce 8ème là, au vu de la Bande-annonce mais surtout de la longueur et du genre. Le western refait surface ces dernières années avec de belles réussites venus de tous horizons (le loufoque Le Bon, la Brute et le Cinglé, le crépusculaire The Proposition ou encore le sobre mais non moins efficace Blackthorn). Comme quoi, les Ricains n'ont pas le monopole du bon western, et en temps que fan du genre, ce n'est pas pour me déplaire.


2h47 de western. "C'est bien mais c'est vraiment long", ai-je entendu 30 fois ces dernières semaines. S'il y a bien un genre où le "Plus c'est long, plus c'est bon" peut fonctionner à merveille, c'est le western, histoire de poser l'ambiance. Alors merci Quentin d'avoir fait durer le plaisir sur ce coup. QT est un vrai amateur de western, on le sait. Mais ici bien plus que dans Django il le prouve. Tout d'abord en faisant le choix de la neige dans un western, plutôt désarçonnant au premier abord. Mais pas tant lorsque l'on connait la réussite qu'est Le Grand Silence, de Sergio Corbucci qui nous avait offert un duel mythique dans la poudreuse entre Klaus Kinski et Jean-Louis Trintignant. Un chef d'oeuvre du genre dont Tarantino s'est fortement inspiré pour placer le décor de son film dans le Wyoming. Sur le plan formel, QT reprend lescodes du genre que l'on pouvait voir du temps de l'äge d'or Hollywoodien, intercalant tour à tour le système de pancartes annonçant les scènes donnant alors ce petit grain vintage, mais aussi l'introduction musicale ou l'entracte.


Tarantino fait durer ses scènes, et ça fait du bien. Il y a longtemps que je n'avais pas vu une telle montée de tension sur la longueur au cinéma, depuis La Chasse de Vinterberg (4 ans c'est long !). La première heure est longue, mais elle pose à merveille le décor: on s'enferme inéluctablement dans la mercerie de Minnie et ce ne sera pas pour trier les les lentilles. D'ailleurs, Quentin nous le rappellera à chaque fois qu'un de ses personnages ira braver le blizzard. Je pense notamment à la scène où le major Warren et Bob le Mexicain tendent un fil de la mercerie jusqu'à la cabane au fond du jardin. La musique nous rappelle immédiatement à l'ordre par un cri strident: la fin est proche, mais c'est à l'intérieur que ça se passera, alors tout le monde rentre, hop hop hop !


Cette musique, parlons-en. Ennio Morricone, un nom indissociable du western (y a-t-il plus belle composition que celle d'Il était une fois dans l'ouest ?). QT s'est donc attiré les services du maestro, et on connait l'importance de la musique pour le réalisateur, la précision avec laquelle il étudie l'adéquation de chaque scène avec chaque note. Lorsque Bob joue les premières notes au piano par exemple, tu comprends instantanément que la scène aura une importance vitale dans le récit. La grande boucherie va pouvoir commencer. La maestria visuelle et auditive est enclenchée et ne s'arrêtera plus.


QT est un cinéphile averti et l'influence qu'Hitchcock a eu sur lui saute au yeux, que ce soit par l'utilisation du Macguffin (un objet mystérieux qui sert au développement de l'histoire en revenant à plusieurs reprises) à travers la lettre de Lincoln, la montée de tension crescendo ou encore la résolution d'une énigme dans une seule et même pièce (ici trouver le/les complice de Daisy Domergue). Inutile aussi de mentionner que Tarantino fait aussi référence à ses propres films, Reservoir Dogs en tête. (quel casting mes aïeux !)
Faire la liste des références que Tarantino place dans ses films est un jeu jouissif pour tout passionné et le réalisateur nous donne encore ici beaucoup de matière pour nous amuser.


Le réalisateur nous donne encore une fois une leçon de Cinéma et divertissement, et celle-ci est d'autant plus instructive qu'il rebondit après les deux perles qu'étaient ses derniers films. Si pourtant ma préférence va aux Basterds et Django, ses Salopards débouchent sur le film le plus maîtrisé de son auteur, ce qui est d'autant plus louable tant l'exercice paraissait périlleux. Quentin Tarantino me bluffe d'année en année et me berce depuis mon adolescence à coups de gunfights et litrons d'hémoglobine. Cette constance dans la qualité se retrouve chez très peu de réalisateurs, mais on ne peut même plus parler de constance à ce niveau tant Quentin Tarantino s'affirme film après film comme un mastodonte marquant son art de son empreinte.

WelshOrson
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le 31 janv. 2016

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Loïc A.

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