Quand un réalisateur tente de mettre en image la vie de 'quelqu'un', il risque souvent de se heurter à un gros problème scénaristique: la retranscription fidèle d'une vie au détriment de la compréhension humaine. Martin Scorsese, malgré son grand nom, tombe pourtant dans le piège.

Le film fascine et jamais le spectateur n'a l'occasion de s'endormir grâce à une mise en scène léchée, une bande son accrocheuse, et une reconstitution de l'époque minutieuse. Pourtant ça ne raconte pas grand chose, comme souvent dans les films du réalisateur; sauf que, si d'habitude le spectateur se réjouit d'un flot d'émotions sur fond de 'non-histoire', ici on ne comprend jamais les motifs du héros; ellipsée est la pensée, ainsi que pas mal de faits afin que l'histoire ne dure pas trop longtemps peut être? ou bien parceque personne n'a pu combler ces trous?

Résultat, comme le personnage de Ray Liotta le dit lui même à la fin,on attend simplement que ça se passe: une scène suit une autre. Parfois il se passe un fait spectaculaire (un meurtre) qu'une voix off vient commenter afin de ne pas totalement larguer le spectateur, puis c'est retour à la fête d'une façon assez monotone, applatissant ainsi chaque scène d'action du film; les conflits sont également absents du film la plupart du temps, il s'agit juste de voir comment un laquet monte les échelons petit à petit, grâce aux bonnes connections qu'il a pu se faire au fil du temps,et comment il s'autosabote. Sachant aussi que Martin ne filme jamais le basculement entre le tout va bien et le tout va mal, comme s'il voulait montrer que dans la vie un tel moment n'existe pas. C'est d'ailleurs là l'erreur de Martin: vouloir montrer une vraie personne et non un personnage. Mais un film, ce n'est pas la réalité. Et quand un personnage sur grand écran ne suit pas un minimum de règles imposés par le cinéma, c'est à dire une certaine logique de penser, il apparaît très vite innaccessible, faux. Ce manque de compréhension dans le personnage campé par un Ray Liotta excellent, soi dit en passant, nous empêche d'ailleurs d'avoir le moindre ressentiment lorsqu'il en vient à trahir ses amis, ses goodfellas... On attend juste que ça se passe.

Bref, je n'ai jamais été un fan de Martin Scorsese, et ce film me confirme que je ne le serai certainement jamais, même si ses trois derniers films m'ont laissé une certaine satisfaction. Goodfellas s'adresse aux fan de gangsters ou aux fans de Scorsese; pour ma part, fan d'une narration plus traditionnelle, avec de véritables enjeux, de véritables personnages solides, je passe mon chemin et recommande aux autres de faire de même.
Fatpooper
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le 10 janv. 2012

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