Les films de gangsters ne sont pas ma tasse de thé car en général ils ne se détachent pas du schéma type qui expose l'ascension puis la chute du personnage principal. Par contre j'aime bien Scorsese et j'étais curieux de voir ce qu'il faisait avec ce genre qui lui tient manifestement à cœur.
Évidemment le réalisateur ne cherche pas du tout à glorifier les hors-la-loi et c'est le ton employé qui m'a plu. La musique reste toujours gaie, même lors des moments moins heureux. Elle accompagne énergiquement le quotidien de Henry Hill, que l'on suit visuellement grâce des travellings nonchalants donnant à l'ensemble un côté je-m'en-foutiste plutôt plaisant. Par contre, quelques séquences violentes viennent casser cette atmosphère et affectent autant le spectateur que le héros.
Elles ont généralement pour origine les réactions à vif de Tommy, un mafieux joué par Joe Pesci qui laisse régulièrement libre cours à ses pulsions. Ce personnage forme avec Henry et sa femme Karen un trio très intéressant puisqu'il permet d'explorer trois facettes des membres de la mafia. Tommy est, comme je l'ai dit, un cinglé de la pire espèce, qui profite de son statut pour exprimer sa cruauté. Henry possède un caractère bien opposé : il baigne dans le milieu depuis le début de son adolescence et voit la mafia comme un moyen de devenir riche et de vivre sans problèmes. Par conséquent, il est conciliant et essaye de ne pas tremper dans des affaires trop sales. Quant à Karen, elle joue certainement le rôle auquel le spectateur peut le plus s'identifier. Elle a beau savoir que son amant est quelqu'un de peu fréquentable, elle n'en est pas moins fascinée par le milieu malsain dont il est issu et elle finira par se laisser tenter par une vie facile.
C'est d'ailleurs Karen qui remarque la première que la mafia est un milieu bien pauvre socialement parlant. Quand elle rencontre les femmes des collègues de Henry, elle ne peut s'empêcher de penser que ce sont des pots de peintures ambulants qui ne font que brailler à propos de leur maris ou de leurs enfants. Tout au long du film on observera que les hommes ne sont guère mieux puisqu'ils sont avant tout des beaufs névrosés et violents. Cette déconstruction est classique mais a le mérite d'être bien interprétée, surtout par De Niro qui brille à chaque apparition.
Les Affranchis est finalement un long-métrage assez bavard qui présente efficacement la toile dense que forment les relations au sein de la mafia. L'ensemble est assez conventionnel mais bénéficie du soin de Scorsese pour représenter ce milieu peu attractif.