"Plutôt mourir de la main de son mari...que de périr aussi honteusement"

"Les Amants crucifiés" constitue mon premier film japonais (exclusion faite de l'animation), et ce n'est pas n'importe lequel ! Bon j'avoue, on me l'a copieusement vendu et je savais d'avance qu'il me plairait forcément.
Néanmoins, j'ai envie d'exposer ici les impressions que j'ai eues car qui sait, dans quelques temps j'aurais peut-être un autre point de vue.

Les films non-occidentaux ont cette faculté de ne pas exposer des faits de manière manichéenne. Et c'est justement cela que Kenji Mizoguchi parvient à faire ici. Il expose de façon très subtile des grands thèmes de la société du XVIIIème siècle japonais qui pourraient très bien se transposer de nos jours à un degré plus ou moins différent bien sûr.
Le couple au centre de l'histoire suit une sorte de quête initiatique. Il n'a pas fauté au départ, mais est tout de même accusé brutalement sans compréhension de la part de leurs proches. D'étapes en étapes, les deux jeunes gens finissent par trouver l'un dans l'autre ce sentiment d'union qui constitue leur lien externe à la société. Cette société dans laquelle ils ne se reconnaissent plus car trop intolérante, trop injuste, trop terrible. Et en même temps, difficile de contredire une éducation ancestrale, une tradition ancrée dans les esprits de chacun. Si on ne s'intègre pas dans le monde des hommes tel qu'il est fait, on ne peut cohabiter avec ses comparses. Seul subsiste la fuite ou la résignation. Au final, tout est question de point de vue et même si le réalisateur a choisi la défense des opprimés, des amants, on sent qu'il ne peut y avoir d'échappatoire à ce monde d'apparences, hormis de petites révolutions individuelles, des libertés, qui feront peut-être avancer les mentalités.
Sinon, j'ai adoré l'image de ce film, les plans semblent tous soigneusement choisis, les décors sont impeccables, les costumes splendides. Et que dire de la musique et du son, qui nous envoient tantôt dans ce Japon mythifié, tantôt dans cet état d'esprit mélancolique, ou dans ce quotidien brimant les libertés.

Je crois que je vais continuer dans ma lancée et découvrir de nouveaux films japonais de ce genre prochainement. C'est un cinéma profond et expressif qui me plait déjà beaucoup.
elfemere
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le 28 août 2014

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elfemere

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