Anaïs est jeune, elle est mutine, hédoniste, croqueuse de vie, parfois égoïste, toujours adorable.
Elle fait tout en retard, tout à l'arrache, elle court sans cesse, se pose et pose trop de questions, veut tout savoir, mais elle avance pourtant, "comme un tracteur", un bulldozer qui obtiendra toujours ce qu'elle veut.
Le film dans sa première partie lui ressemble ; il est léger, printanier, coloré, drôle, il court à mille à l'heure, il est un délice brut, littéraire, référencé, délicat, émouvant, toujours envolé.
Puis, sans crier gare, il se transforme, son ton s'apaise, devient plus sérieux, plus énigmatique, à l'image de son personnage que l'on commence à découvrir dans sa complexité, voire sa bizarrerie. Et l'on se retrouve alors face à une sublime histoire d'amour sensuelle (et impossible ?), et Les Amours d'Anaïs, au titre si Rohmérien, devient alors (comme d'ailleurs souvent avec Rohmer dont le style semble irriguer chaque ligne de dialogue et chaque scène du scénario) un superbe film de femmes, où quand la comédie aérienne et vive se dote soudain d'une épaisseur fascinante.
Pour son premier long-métrage, Charline Bourgeois-Tacquet, dont on prend plaisir à découvrir le travail et qu'on suivra désormais de près, surprend et nous conquiert, par la malice qu'elle distille dans sa mise en scène délicate, la direction de ses (superbes) actrices (si Anaïs Demoustier, dans son meilleur rôle, et Valeria Bruni-Tedeschi sont évidemment sublimes dans leurs différences etr points d'accroche, Denis Podalydes n'est néanmoins pas en reste, toujours aussi précis), et la puissance et la beauté inattendues qu'elle donne dans ses derniers instants à son film que l'on n'aura jamais cru nous émouvoir autant.