Avec le prix d'une place de cinéma en 2018, peu de gens vont voir le même film deux fois sur grand écran... mais je n'ai pas pu m'en empêcher ! Je suis allé voir cette suite deux fois non pas parce que je l'ai adoré mais parce qu'au contraire j'étais frustré, frustré et surpris d'avoir été déçu par un film de l'univers Harry Potter (attention, j'utilise bien le terme "décevant", pas "mauvais" car je ne pense pas que ça soit le cas), il fallait que je réessaye. Alors désappointement à cause d'une attente trop élevée ou film réellement en dessous de ce que les autres long-métrages de l'univers nous ont habitué ?


Attention, cette critique comporte des spoilers...


Dans ma critique du premier opus Les Animaux fantastiques, j'avais relevé qu'impliquer la créatrice de l'univers dans la construction de l'histoire était un avantage certain. Je confirme que le fait que J.K Rowling ai inventé le monde des sorcier en fait la personne la plus qualifiée pour trouver les bonnes idées pour prolonger l'univers des sorciers. Cependant, j'ajouterais dans cette critique que la seule présence de l'écrivain au scénario est aussi un énorme désavantage, qu'il faudrait également un bon scénariste de métier pour bien ficeler les idées de l'écrivain. En effet, un script ne se rédige pas comme un roman de 500 pages ; or, on remarque que Les Animaux fantastiques 2 est beaucoup trop surchargé pour un film de 2h14. Il est surchargé au sens où il est composé de nombreux arcs narratifs, on a une intrigue principale sur la monté en puissance de Grindelwald qui veut se servir de Croyance que les autres protagonistes veulent soit tuer soit protéger pour éviter que ça se produise ; et on a plein de sous-intrigues, une autour de la relation Dumbledore / Grindelwald, une autre sur la vie amoureuse des personnages, une toute petite sur les relations qu'entretien Norbert avec son frère et Leta, une sur le retournement de veste de Queenie, encore une autre sur les Prédictions de Tycho Dodonus qui rejoint celles sur la culpabilité de Leta Lestrange et enfin une sur la recherche par Croyance de la vérité sur ses origines qui va mener à un twist final en guise de cliffhanger... On remarque que la plupart de ces sous-intrigues servent surtout à introduire les futures suites, donc paradoxalement le fait que le film parle de trop de choses a pour conséquence qu'il parle en lui-même de pas grand chose étant donné que seuls les arcs narratifs qui en deux heures et quart ont le temps d'être complètement approfondis sont ceux autour Leta Lestrange et dans et dans une moindre mesure la monté en puissance de Grindelwald. Un thème qui est peut être en trop, c'est celui des histoires d'amour qui sont ennuyeuses à regarder. En plus de raconter à la fois tout et rien, il y a une autre contradiction dans le scénario : il est trop simple et en même temps compliqué. Trop simple car il y a trop de coïncidences, par exemple par une succession de concours de circonstances, les personnages se retrouve tous à Paris et comme par hasard se croisent tous comme ci ils étaient dans un petit village, ça s'appel des facilités scénaristiques. Il est aussi compliqué car il ne va pas à l'essentiel, la révélation que fait Yussuf Kama avant la révélation de Leta Lestrange donne un effet de redondance, elle est de trop, il aurait était peut être fallu supprimer Yussuf Kama de l'histoire ainsi que Les Prédictions de Tycho Dodonus pour seulement établir un lien entre Leta Lestrange et Croyance (d'ailleurs encore un coïncidence, comme par hasard le bébé que Leta a échangé est l'obscurus que Norbert a tenté d'aider à New-York, or Leta a toujours été très proche de Norbert). C'est un film familial et je ne pense pas que les enfants vont réussir à comprendre tout le long-métrage alors que les autres opus de l'univers n'ont jamais été compliqués à comprendre pour les plus jeunes. Le scénario comporte quand même certaines qualités : l'histoire est moins manichéenne que dans Harry Potter, elle est plus ambitieuse et prend plus de risques que celle du premier Les Animaux fantastiques, certaines idées comme le freak show, le malédictus, l'histoire de Leta, le pacte du sang, le phénix sont intéressantes et les créatures sont introduites comme il faut dans l'histoire selon moi (par rapport à l'ampleur des enjeux du film, je préfère qu'elles aient un second rôle à vrai dire). Par contre je doit avouer que le twist final ne m'emballe pas trop pour le moment (oh une autre facilité : comme par hasard le bébé que Leta a échangé est l'obscurus que Norbert a tenté d'aider à New-York et coïncidence, cet obscurus est selon Grindelwald le frère de Dumbledore qui fût le professeur de Norbert et Leta). Par rapport à la cohérence vis à vis des romans, je préfère ne pas me positionner mais il ne faut pas oublier qu'on est dans l'univers cinématographique et non littéraire et que les films Harry Potter sont moyennement fidèles aux romans depuis le quatrième opus, donc je me demande vraiment si c'est pertinent d'analyser la continuité par rapport aux livres plutôt que de seulement l'analyser par rapport aux autres films de la saga. Par contre il faudra nous expliquer dans la suite comment Grindelwald peut connaître les origines de Croyance alors qu'il ne savait même pas qu'il était l'obscurus dans le premier opus.


Si J.K Rowling a une imagination incontestable et qu'il lui faudrait lui accorder une seconde chance pour la suite en lui donnant un appui scénaristique pour que tout soit bien coordonné et adaptable de façon correcte au cinéma, David Yates doit partir. Pourquoi ? Ses réalisations ne sont pas du tout mauvaises mais hormis un visuel sombre et des scènes d'action rapides (comme la scène d'ouverture), il n'a pas apporté grand chose de personnel à la saga cinématographique, même au bout de six films (six chances). Il faut un véritable metteur en scène qui laisse aux films une vraie identité, comme Guillermo del Toro. Ici, la seule chose qui est intéressante dans la réalisation, c'est l'ambiance puisque le jonglage entre l'humour, l'émotion et la noirceur de certaines scènes est super. Les scènes d'action ne sont pas spectaculaires comme par exemple celles des épreuves dans Harry Potter et la Coupe de feu où on est en mode "wow" mais elles restent bonnes. Et tout cas, tout ça nous donne un film bien divertissant ! Les flashback sont quant à eux bien placés mais trois flashback, c'est trop, ça casse le rythme.


Pour les personnages, je suis encore plus mitigé que pour le premier opus. Certains sont très mal introduits : le concept du malédictus est intéressant mais en soit le personnage de Nagini est totalement inutile ! La présence de Jacob sert ne qu'à justifier les raisons de la trahison de Queenie et à apporter un peu de légèreté dans l'ambiance, le personnage est certes drôle mais n'a pas plus d'utilité que Nagini dans l'histoire. Yusuf Kama est quant à lui un personnage qui aurait peut être dû être supprimé pour éviter la redondance d'intrigues, de twist et flashback. Tina est également très mal introduite dans l'histoire, elle est juste là pour servir d'intérêt amoureux à Norbert, elle n'est pas du tout développée et de toute façon il n'y avait pas la place pour ça, j'espère que dans le troisième opus ça sera la relation Queenie / Tina qui sera approfondie plutôt que l'histoire d'amour avec Norbert. Nicolas Flamel ne sert à rien lui aussi, il est juste là pour le fan service et ça c'est extrêmement agaçant (Nagini aussi mais c'est du fan service plus intriguant). Norbert qui est le personnage principal n'a strictement aucun charisme car il est sous-développé, la seule chose qu'il a d'attachant c'est son amour pour les animaux fantastiques. Par contre, je trouve que le traitement des autres personnages fonctionne globalement assez bien. Par exemple, Gindelwald est un excellent méchant ! Il est très différent de Voldemort, plus paradoxal. C'est un personnage extrêmement manipulateur et un peu menteur mais qui préfère laisser les autres choisir leur camp de façon délibéré plutôt que d'utiliser l'imprium. C'est un personnage qui affirme ne pas détester les moldus mais désire les dominer pour d'après ses dires préserver le monde des sorciers de leur arrogance et leur barbarie. C'est un personnage qui organise des assassinats mais sur lequel on ne li aucune satisfaction sur le visage lorsqu'il fait quelque chose de cruel. C'est enfin un personnage dangereux mais pour lequel Dumbledore a de l'affection. Voilà pourquoi il est si paradoxal et intéressant. Queenie a quant a elle vraiment des réactions très disproportionnées et stéréotypées dans le film qui font qu'on a du mal à autant tomber sous son charme que dans le premier film (c'est pour ça que j'utilise le terme "globalement" pour dire que certains personnages sont bien traités car j'ai quand même quelques réserves sur certaines choses) mais j'ai bien aimé son choix de rejoindre Grindelwald, j'ai trouvé ça inattendu et je pense que ça a une utilité au sens où Grindelwald est un personnage très politique et on voit à quel point un esprit manipulateur comme le sien peut influencer une personne naïve et sensible comme Queenie avec des paroles fatalistes mêlées à un ton éloquent et de belles promesses persuasives, parlant d'un avenir meilleur, c'est un sujet assez contemporain. Queenie n'apporte en elle-même pas beaucoup à l'histoire mais c'est toujours plus que Tina qui est censée avoir un rôle plus important. Leta qui culpabilise et Croyance qui recherche sa mère apporte quant à eux les meilleures scènes d'émotion du film et ont une histoire intrigante. Pourquoi je range Grindelwald, Queenie, Leta et Croyance dans la même case alors qu'ils n'ont rien à voir ? Car entre un méchant paradoxale (Grindelwald), le protagoniste le plus innocent qui rejoint l'antagoniste (Queenie), l'ex serpentard qui est le personnage le plus courageux (Leta) et l'obscurus (Croyance) qui veut seulement connaître la vérité, on obtient un film qui n'est pas manichéen. J'ajouterais que c'est vraiment un plaisir de revoir Dumbledore qui a toujours le même charisme malgré le second changement d'acteur.


Tout ces personnages sont bien interprétés, il n'y a que pour Eddie Redmayne que j'ai encore des doutes. Katherine Waterston, Dan Fogler, Zoë Kravitz, William Nadylam, Ezra Miller et Alison Sudol sont bons. Les deux acteurs les plus remarquables du film, c'est évidemment Jude Law et Johnny Depp. Jude Law car on aurait pu penser que c'était impossible de succéder à Michael Gambon dans le rôle de Dumbledore et pourtant il entre parfaitement bien dans le personnage, on s'attache directement à lui. Johnny Depp est lui aussi parfait dans le rôle de Grindelwald, on lui reproche parfois de ne pas faire d'effort en jouant la même chose d'un film à l'autre ; mais ici il s'est totalement approprié son protagoniste.


Techniquement, le film fonctionne plutôt bien. Les effets spéciaux sont encore une fois très bien faits à l'exception de Nagini qui est plus réaliste dans Harry Potter. La photographie est comme dans chaque opus réalisé par David Yates bien travaillée sauf dans la scène d'ouverture où les flash de lumières sont trop aveuglants. La 3D n'est pas transcendante mais il y a un minimum de profondeur et elle est toujours plus utile que dans Les Reliques de la Mort. La direction artistique est superbe, si le New-York des années 20 était bien reconstitué dans le premier film, ici Paris de la même époque est également très bien fait. La bande originale composée une nouvelle fois par James Newton Howard est bonne, aussi agréable à écouter que celle du premier film mais elle très mal montée, trop changeante d'une scène à l'autre.


Les Animaux Fantastiques : les crimes de Grindelwald est un bon divertissement mais on attend largement plus d'un film de l'univers des sorciers qu'un divertissement ; il est donc un peu dans le même cas que Le Hobbit : la bataille des cinq armées par rapport aux autres films de l'univers de Tolkien ! Cette suite est d'autant plus inégale que certaines de ses qualités sont aussi ses défauts (par exemple les personnages). Le résultat est globale certes très décevant mais certains début d'arcs narratifs pourraient être exploités de manière intéressante dans les suites. La meilleure combinaison pour que le résultat soit de qualité supérieur dans les prochains volets serait peut être une J.K Rowling qui trouve les idées, un vrai scénariste professionnel qui coordonne ces idées, développe, ajoute et corrige sans trop dénaturer et un bon réalisateur qui impose son style dans la mise en scène.

MovieBuff

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