Les yeux brillent et le coeur en redemande.

Benh Zeitlin nous décrit un univers sale, fait de bric et de bêtes - où même l’héroïne porte le nom d'un animal - "chiot silencieux" - sans cesse détruit par les tempêtes ; un monde où tout est dur, où on sous-vit, où il faut être fort - le caïd et non femme - et où pourtant rien n’est plus humain et plus à fleur de peau, et où même face à nos peurs et à la mort, on peut dire « tu n’es pas si méchante que ça, en fait… ».
Tout le film, que ce soit à travers les cadrages ou l’interprétation des évènements est vu par l’enfant, ce qui suppose de nombreuses métaphores, propres à chacun. Malgré la touche fantastique de ces aurochs magnifiques, tout semble vrai. L'esthétique du film, caméra à l'épaule, lumières naturelles, prises de vues volées et images d'archives, y contribue. On croit à ces gens qui aiment par dessus leur propre santé leur bayou, à ce clivage entre la "société" protégée par une gigantesque digue et le monde - leur monde - où tout vit, au père trop dur mais malade et surtout à cette fillette pleine d’espoir, d’imagination et débordante de vie. Et c'est beau... L’interprétation des deux comédiens est d’ailleurs majestueuse, poignante et redoutable. Pour couronner le tout, la musique a été co-composée par le réalisateur – Ah ! Ces artisans de l’art total ! – et on ne peut qu’être sous le charme de ce thème dansant, amenant une dimension de fête dans ce monde brut.
Tous ces ingrédients intelligemment orchestrés sont comme une décharge et une bouffée d'air, si grandes que les yeux brillent et que le coeur en redemande.

En un clic : Un film bouleversant, à voir absolument.