Christian Bale a raccroché son costume de chevalier noir pour revenir aux fondamentaux, comme l'a fait Hugh Jackman -non sans une franche réussite- pour "Prisoners". Ce nouveau thriller de Scott Cooper, dont le background a des relents de pauvreté crasse, n'est pas sans rappeler "the machinist", l'une des réussites majeures de Bale, pour laquelle il avait perdu 28 kilos en trois mois. Le comédien y incarnait un employé d'usine souffrant d'insomnie depuis plus d'un an, et dont la vie se dérègle peu à peu. Une performance qui a largement contribué à étoffer son cv. C'était en 2004. Depuis, hormis le mitigé "Bad times", le comédien n'est apparu dans aucun autre thriller de ce style, qui lui va pourtant comme un gant (à mon goût).
Plus de gros bras, plus de folles course-poursuites, et plus de super héros. Les brasiers de la colère, c'est une plongée au coeur d'une Amérique malade et en déperdition, où Dieu semble avoir levé le camp depuis longtemps. Le scénario est des plus simples, et contrairement à ce que l'on peut s'imaginer, il le reste jusqu'au bout. Pas de noeud dans la tête ou de rebondissement improbable. C'est l'histoire d'un homme revenu de quatre missions en Irak, que les horreurs de la guerre ont réduit en miettes. Sans diplôme ni ressources, et en l'absence de son dernier vrai repère dans la vie (son frère ainé, ndr), le jeune homme (Casey Affleck) commence à glisser sur la pente dangereuse des activités illégales, comme les combats de boxe clandestins.
Bien entendu, les choses vont mal tourner pour lui, et son frangin (Bale), qui vient de purger une peine de prison suite à un banal mais grave accident de la route, va devenir sa seule chance de s'en sortir.
Le film se concentre essentiellement sur ses personnages, et donc s'appuie sur un casting de tout premier choix qui mène la danse de A à Z. L'histoire en elle-même reste affreusement banale, pour ne pas dire ennuyeuse puisque maintes fois racontée à diverses sauces. Ce sera d'ailleurs ma déception principale, car les prestations du carré Bale-Affleck-Harrelson-Dafoe tiennent suffisamment la route pour permettre au spectateur d'être tenu en haleine et garder le cap. Dommage que le scénario soit vraiment trop linéaire et si peu accrocheur.
J'ajouterai qu'une certaine irrégularité dans le script apporte par moments une lourdeur malvenue, ainsi que quelques lacunes de rythme sans vraie gravité toutefois. Le jeu de Christian Bale, et surtout celui de Woody Harrelson, qui incarne le bad guy sans foi ni loi par excellence (un goût de remember de "Tueurs nés"), apportent une valeur ajoutée conséquente à un long métrage plutôt standard dans son déroulement.
Je n'irai pas plus avant dans les détails, mais pour ma part, tout ce que je peux en dire, c'est que j'ai passé un moment sympathique sans pour autant crier pour autant au génie. Pas de vraie morale ni message concret apporté par le film, hormis le fait de dépeindre une histoire dure et sans concession que subit une certaine frange de la population, en proie à la misère sociale la plus complète.
On peut observer un décalage entre le titre plutôt évocateur (que ce soit en VO ou VF) et le contenu manquant justement de rage et de relief. Cela ne vient pas des personnages, mais d'une écriture trop lisse et trop conformiste, et ce, malgré un environnement âpre et brutal tout à fait en adéquation avec le thème traité.
Sans faire partie du haut du panier, "Les brasiers de la colère" convainc juste assez par sa force de caractère et son ambiance glauque, le tout orchestré par un casting de très haute volée. Mention spéciale à Woody Harrelson qui effraie énormément, à plus d'un titre. Dommage que le récit avance les pieds sur les freins...