“En 1971, le monde était en pleine mutation mais ici en Suisse, le temps semblait s’être arrêté”. Sur cette phrase s’ouvre le film. Le ton est donné, on découvre un village comme un ermitage suspendu à la douceur des montagnes et préservé de la rumeur du monde. Puis l’histoire dévoile le parcours de Nora, une jeune mère au foyer interprétée par la Berlino-Bâloise Marie Leuenberger, qui combattra publiquement en faveur du suffrage féminin.


Il y a un plaisir indéniable à observer la lutte de ces femmes sous la direction de Petra Volpe. La mouvance féministe s’expose avec humour, tendresse et surtout beaucoup de justesse à travers le personnage de Nora. Elle n’a pas la rage intrinsèque des ces amazones en guerre contre un déterminisme social; sa volonté première n’est pas de bouleverser les droits des femmes, néanmoins elle souhaite s'émanciper des bassesses ménagères et elle rêve d’un travail. Alors elle prendra la parole, et dans ce village calfeutré dans l’ombre des montagnes, la rumeur débridera un silence phallocrate.


L’ordre divin n’est pas que le récit d’une guérilla contre l’oligarchie des hommes mais plus largement, une allégorie du “Connais-toi toi-même” socratique qui assigne aux êtres de devoir prendre conscience de leur propre mesure. C’est donc une quête initiatique pour Nora, pour ces femmes et leurs maris qui lentement redéfinissent leur rôle à mesure que leur suprématie s’effrite. Enfin, le film désacralise les préceptes divins, qui sous couvert de bonne-foi, étouffent le libre arbitre des sociétés. Un grand film en course aux Oscars 2018 dans la catégorie "films en langue étrangère".


L'ORDRE DIVIN (Die Göttliche Ordnung) | CRITIQUE | Socrate au pays d'Heidi ?

guardianalfred
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le 22 août 2017

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