Un garçon qui creuse les sillons de son champs et se fait des ampoules sur son soc, voilà une aventure peu palpitante, et pourtant, Les Contes de Terremer se contente de ce genre de train-train agréable jusqu'à sa partie finale, qui condense in extremis tout ce que l'on peut attendre d'un combat épique contre les forces du Mal. Une impression étrange s'empare de nous au visionnage de ce Miyazaki si singulier, entre le vrai plaisir de n'avoir - pour une fois - pas une aventure complètement délirante et bourrée de créatures en toutes sortes (cela change) mais aussi un pincement au cœur en sachant que c'est la patte du maître Miyazaki que ce fantastique déluré. On aime bien cette sensation d'histoire moins fournie, de ces personnages qui prennent le temps (ils s'arrêtent même aider une fermière à faire son labourage), des quelques batailles - vite terminées - qui parsèment l'intrigue. Mais ce que l'on regrette, en revanche, c'est d'avoir si peu d'explications sur le déroulé des événements, avec tout le temps que possède (pourtant !) ce film ! Ainsi, on ne sait pas très exactement pourquoi le jeune prince a tué son père à ce moment précis et pour quels motifs (un coup de folie ou un coup de la partie obscure du prince, d'après le scénario qui balaye toute question avec ces quelques mots), d'où sort ce double maléfique du prince, comment se fait-il que la jeune fille se révèle être si tard
un dragon
(surtout : pourquoi n'a-t-elle pas utilisé ses pouvoirs pour se libérer des attaques des gardes au début du film ?), les personnages qui n'ont pas beaucoup d'informations sur leur passé (background très faible)... On s'agace vite à tenter de percer tous les mystères de ce scénario, et mieux vaudra le laisser couler pour la beauté de l'histoire racontée. La fin offre vingt minutes d'action et fantasy copieuses, comme pour rattraper le manque durant l'heure et demi qui la précède, et nous gonfle un peu (il faut l'avouer) avec sa morale épicurienne discutée à sens unique. Mais l'on sort de ce film plutôt content, grâce aux belles images colorées et aux mille détails graphiques, qui font tout le charme et l'unicité d'un bon Miyazaki. Un peu plan-plan, mais pas désagréable pour autant.