Moonfleet tendrait à apporter de l'eau au moulin à la théorie selon laquelle le conte est le genre le plus concentré qui soit, celui qui contient tous les autres.
Moonfleet est bien un conte initiatique et son réalisme, sa vraisemblance est aussi nulle donc que sa force intérieure est puissante.
Entre autres originalités - mais à chaque vision, Moonfleet semble offrir un côté particulier tel le diamant - il y a ce garçon dont la force et le courage tiennent à ses idées fixes, à son aveuglement partiel (et temporaire?) qui lui fait passer les épreuves presque sans encombres sans tenir compte de la réalité. Humain, trop humain. Cet entêtement aussi beau dans le film qu'insupportable dans la réalité est un des miracles du film de Lang qui culmine dans une fin qui fusionne le romantisme allemand (l'Île des Morts) et le sens religieux hollywoodien...
Le style de Lang est sublime, au sens propre, hiératique souvent et d'une précisiond de hiéroglyphe, gommant le maximum, ne gardant que l'essence du mouvement et laissant le reste à l'imagination du spectateur.
Ramassant l'action, insistant sur la symbolique des lieux, du sous-sol et des ciels lourds d'une encre noire et fatale pesant sur la tête blonde de cet orphelin dont l'intrépidité et l'entêtement servent de chapeau et de protection dans un monde de dupes et de jupes.
Deux thèmes obsédants achèvent de porter Moonfleet sur ces hauteurs de feu avec lequel le Technicolor a parfois su nous mettre en contact.