Métaphore familiale du château de carte

Thomas Bidegain n'a même pas réfléchi, son film doit sortir et je me demande encore pourquoi on ne l'aurait pas sorti. Le film ne touchait en rien aux évènements récents. Ni de près, ni de loin.
Mon 7 est fortement influencé par l'explication de Thomas Bidegain qui donne un vrai plus à la compréhension de son film.


Les Cowboys tient beaucoup plus d'une fresque familiale touchée par le départ de l'un d'eux. Car, si l'on prend Les Cowboys comme un film sur le Jihad, alors le film est raté. Si on le prend comme un film sur la famille, sur la fragilité de l'équilibre familiale, alors Les Cowboys est un bien beau film.


Un bien beau film car il est unique dans son format. Il laisse le spectateur travaillé avec peu d'information. En effet, pas d'information sur l'époque, pour comprendre, il faut être attentif (Oh, un minitel sur le bureau....), il faut écouter pour saisir le temps qui passe.
Le découpage en deux parties est intéressant, dans la première nous suivons un père cherchant à retrouver coute que coute sa fille partie. On entre ainsi dans les réseaux obscures, d’Amsterdam aux Balkans, on suit ce père devenu obsessionnel, ce père qui a abandonné femme et vie pour retrouver sa fille, qui a détruit ce qu'il avait construit durant tant d'année.
On voit alors que l'équilibre à été rompu d'un coup, d'un seul, sans préavis, en tout cas, pour le père qui n'était pas préparé à voir sa fille partir. Et sans préavis, ce père éloigné s'absente, une nouvelle fois temporairement puis définitivement pour laisser place à son fils qui reprendra le flambeau d'une quête perdue d'avance. Elle ne reviendra jamais.
Je suis assez d'accord avec le réalisateur, la première partie a été pour moi plus difficile à sentir, être parent ne s'invente pas et la détresse du père bien que compréhensible ne m'a pas touché particulièrement. Pourtant François Damiens livre une prestation exceptionnel tout du long.


C'est surtout la seconde partie que j'ai trouvé puissante. De part son côté exotique et jusque boutiste. Le fils, le frère veut retrouver sa sœur, il en vient même a tuer pour ça. A travers le Pakistan et l'Europe, traverser la planète pour finalement la retrouver, sans un mot à travers un regard dans une boutique banale que l'on voit n'importe où. Une histoire intimiste d'une famille ordinaire, dans un monde obscure. L'histoire ordinaire d'une fille embrigadée, retrouvée, que l'on suit dans le temps grâce aux différents attentats, World Trade Center, Madrid, Londres...Chaque fois le frère les voit et repense à sa sœur.
Le plus touchant là dedans c'est cette femme que Kid (Finnegan Oldfield) va sauver grâce à une gourmette en or (tellement dingue). Toute cette fresque intégratrice et heureuse donne un souffle optimiste à cette histoire pourtant si dramatique.


Un drame social qui dépasse largement le cadre du Jihadisme. Un drame familial qui montre l'équilibre fragile qui nous entoure. Une famille ordinaire (et tout un village) tel un château de carte est tombé par le départ de l'un de ses membres. Le père en est devenu fou et aura abandonné sa famille, le fils aura retrouvé sa sœur, mais dans tout ça il aura surtout trouvé un vrai sens à sa vie, l'amour, la vie, une raison d'exister malgré la perte d'un père.
Doté d'une photographie magnifique tout du long, Les Cowboys est certainement la Cinexpérience la plus sympa. Car Thomas Bidegain était vraiment content d'être là, de nous parler de son film, de partager sa vision. Certes le film était beaucoup moins drôle qu'Ashpalte, moins tordu que The Lobster où moins Happy movie que Daddy Cool. Mais Les Cowboys marque, laisse une trace avec le temps car le film est intelligent, juste, intime, jamais spectaculaire et toujours singulier.


Les Cowboys fait partie de ces films français qu'on aime découvrir.

Halifax

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