Ca se discute

Générique de l'émission

˗ Bonsoir !!! Bonsoir!Bonsoir!Bonsoir!Bonsoir!Bonsoir!Bonsoir!Bonsoir!Bonsoir!Bonsoir!Bonsoir!Bonsoir!Bonsoir!Bonsoir! Bienvenue dans ce Ca Se Discute consacré ce soir à la jouissance dans la perversion. Et afin de parler et de témoigner de ce mal insidieux, j'ai le plaisir d'accueillir sur ce plateau Roxanne, adepte de la scarification...

˗ Bonsoir !

˗ Michel-Edouard, qui trouve son plaisir dans la douleur du sadisme sexuel...

˗ Bonsoir...

˗ Et enfin Behind the Mask, qui aime, pour bien se faire mal, regarder ce que les personnes normales appellent des navets. C'est bien ça ?

˗ (Voix aigue et déformée) Oui, c'est ça.

˗ On peut donc dire que vous donnez dans le fétichisme jardinier ?

˗ Très drôle Jean Luc Alarue...

˗ Merci, c'est de l'humour Service Public à références... Alors Behind, on va commencer avec vous. Le public qui nous regarde ce soir a bien sûr compris qu'il s'agissait d'un nom d'emprunt car vous avez décidé de témoigner sous le couvert de l'anonymat. Vous portez donc un masque et on vous a filé une voix trafiquée toute pourrie.

˗ Merci de le préciser, Jean-Luc.

˗ Je vais vous poser la première question : A quand remonte votre perversion ?

˗ Et bien Jean-Luc... Je ne sais pas...

˗ Je sais que c'est difficile. Je vais être moins frontal et vous demander depuis quand vous aimez le cinéma.

˗ Ouh là ! Depuis longtemps Jean-Luc. Et je dois remercier mes parents pour cela. Ils m'y ont emmené depuis tout petit : les Disney, Maman J'ai Raté l'Avion... Puis ils m'ont mis devant Gorilles dans la Brume, Abyss, L'Ours, Terminator 2... Que des bons films.

˗ En effet. Vous avez continué et votre amour du cinéma a perduré, mais vous ne pouviez pas tout voir. Vous nous avez confié avant l'émission que vous attendiez la sortie en dvd ou la diffusion à la télé pour voir tous les films que vous aviez raté.

˗ Oui. C'est compulsif. Histoire d'être sûr de ne pas rater un chef d'oeuvre.

˗ Vous souvenez-vous du jour où tout a basculé ?

˗ Pas vraiment, non. J'ai plutôt sombré petit à petit, devant la télé. Des films où j'étais déçu mais qui étaient encore regardables. Et puis, je me souviens de la diffusion de La Tour Montparnasse Infernale... (La voix de Behind devient encore plus aigue, il baisse la tête) C'était très nul, je le savais... (Des sanglots l'étranglent) Mais pourtant, je ne sais pas ce qu'il s'est passé, j'ai...

˗ Behind, c'est difficile, je sais. Vous voulez faire une pause ? Prendre un verre d'eau ?

˗ Non, je veux aller jusq'au bout.

˗ Vous êtes courageux, Behind.

˗ J'ai remis toute ma vie en perspective après cette illumination : il ne pouvait pas exister que des bons films...

˗ Vous vous êtes donc enfoncé.

˗ Oui. Un, puis deux, puis trois... J'étais fasciné par le vide et l'inanité. J'en suis arrivé à faire une liste de ces navets en compulsant mon Télé 7 Jours, histoire de n'en rater aucun. Puis je me suis isolé. Je ne sortais plus et je ne voyais plus personne. Hors de question de passer à côté d'un.

˗ J'imagine que vous n'aviez plus de vie sociale, plus d'amis...

˗ Ils m'ont tous dit qu'ils ne me reconnaissaient plus et que j'avais mauvais goût.

˗ Quel est le dernier mauvais film que vous avez vu ?

˗ Euh, attendez... C'était hier, c'était Les Daltons.

˗ C'était sûr qu'il sentait très fort des pieds, ce film, pourtant.

˗ Avec Eric et Ramzy, aucun doute, c'est même un moyen de reconnaître les meilleurs navets. C'était sûr que c'était nul, comme la plupart des comédies françaises qu'on te commande d'aller voir dans les prime time périmés comme les Enfants de la Télé ou Touche Pas à Mon Poste, quand les acteurs viennent tapiner sans honte. Et quand le présentateur te dit qu'il a bien rigolé, que c'est la meilleure poilade de l'année et qu'il use de superlatifs pour louer le film et lêcher les bottes de la prod', c'est un bon indicateur de la nullité du bouzin, comme l'inévitable figuration de Jean Benguigui.

˗ Y'a vraiment rien à sauver ?

˗ Rien. Eric et Ramzy sont nuls, la BD de Morris est trahie et violée avec du gros gravier. Les seconds rôles, eux, grimacent. L'humour imbécile est périmé, les gags frôlent le surréalisme et ne feraient pas rire un gamin de maternelle. Et cerise sur le gâteau, le chapeau du Mexicain, avec ses pendouilles, est moche à vomir. Comme les couleurs, criardes, qui agressent sauvagement l'oeil du spectateur. La mise en scène est inexistante, comme partie en vacances avec Philippe Haïm qui a laissé un épouvantail derrière la caméra. Le scénario inepte a été écrit le soir de cuite où les producteurs ont fêté l'acquisition des droits. Rantanplan est une abjection totalement à la ramasse, comme tous les effets spéciaux et les maquillages du film. Et Kad Merad et Elie Semoun sont mauvais comme des cochons, comme d'hab' quand ils jouent les guest stars. Il y en a un tas d'autres, de guest stars, toutes aussi mauvaises qu'eux. Le seul truc qui m'a fait moins saigner des yeux, c'est Ma' Dalton et ses amies. C'est maigre...

˗ Vous avez souffert ?

˗ Oui.

˗ Est ce que vous le referiez ?

˗ Certainement, oui. Parce que je veux me rendre compte par moi-même de la nullité de certains films... Je ne sais pas pourquoi, mais la nullité me fascine. Tout comme le fait que le cinéma français puisse la financer avec une constance aussi opiniatre. Mais ça m'aide aussi à apprécier encore plus les chefs-d'oeuvres quand j'en vois. J'essaie de me soigner comme ça.

˗ Je vous remercie, Behind, pour ce témoignage courageux.

˗ Et moi ! Je peux dire que j'ai vu 50 Nuances de Grey et que le film m'a fait plus mal que de me prendre le manche du martinet d...

˗ Merci Michel-Edouard mais nous n'avons plus le temps. Nous devons rendre l'antenne et je terminerai sur ces vers de Musset tiré de Lorenzaccio. Musset disait "L'enthousiasme est frère de la souffrance". A méditer...