Libre adaptation des Caprices de Marianne d'Alfred de Musset (ou plutôt pourrait on dire «Argument Musset» selon les dires du réalisateur), Louis Garrel signe ici son premier film , co-écrit avec Christophe Honoré. Une douce promesse pour le cinéma Français.


Clément (Vincent Macaigne) aime Mona (Golshifteh Farahani, qui livre ici une lumineuse prestation).
Il lui présente son ami Abel (Louis Garrel) qui tombe immédiatement amoureux d'elle également. Mona, la belle prisonnière (en permission le jour pour aller travailler dans une gare) retrouve un soupçon de liberté entre ces deux derniers.
Mais évidemment ; un, deux, trois , il y en a de trop 1.
Un triangle amoureux tout ce qu'il y a de plus classique me direz vous. Mais son traitement en est pourtant tout différent.


Ce qui marque dès les premiers instants du film , ce sont les ruptures de tons. Le tragi-comique est en effet réussi avec brio et est présent tout au long du film.
Pas d'inquiétude, on est bien loin ici du « Ce film est formidable, on passe du rire aux larmes » qu'on nous sort à outrance dans n'importe qu'elle promo d'une mauvaise comédie française.


Le film va suivre l'errance de ces trois personnages, et va errer avec eux de scènes en scènes , de décors en décors , en alternant des situations à forte tension dramatique (parfois presque démesurées), et puis d'autres, absurdes, comiques, burlesques portées notamment par le duo Macaigne/Garrel. On enchevêtre ainsi continuellement des scènes vraiment drôles avec des scènes plus graves , tout ça presque instantanément grâce à de violentes et/ou douces césures. Le film porte alors en équilibre ce paradoxe funambule entre un vent de légèreté , de liberté et une certaine mélancolie, une vraie joie d'être triste sans pour autant en faire trois tonnes sur la gravité des sentiments.


La bande originale , signée Philippe Sarde , est magnifique, et ses mélodies servent très bien ce décalage dramatique de certaines séquences. Elle est aussi accompagnée par d'autres très bons morceaux qu'on peut (re)découvrir ici :
I fell in love with a dead boy - Antony and the Johnsons
King Krule - Easy Easy


Si le film décrit très bien l'exploration du sentiment amoureux, et qu'on y retrouve parfois de magnifiques émois adolescents, il est avant tout un film sur l'amitié.
Garrel l'a très vite précisé , il voulait faire un film sur l'amitié masculine loin de la camaraderie et il est vrai qu'à l'époque de la «bro attitude» on en est souvent bien trop loin au cinéma. Il nous montre alors l'amitié masculine sous sa propre mécanique, avec son propre discours, ses failles, sa lâcheté , sa sensualité et son allégresse.


Vincent Macaigne reprend une nouvelle fois son costume de clown triste/looser/amoureux transi , et même pour les plus réticents à son égard , il le porte ici à la perfection. Le ridicule de son personnage apporte à la fois toute la mélancolie et la volubilité du film.


On pourra toujours reprocher le côté bobo parisien , copinage lié au film (Garrel engage ici son pote et sa dulcinée) ou encore l'aspect film «de»,«écrit»,«par»,«avec» Louis Garrel.
Pour autant , l'émergence d'une telle synergie de ce duo/trio d'acteurs tient essentiellement de leur complicité hors caméra. De plus Garrel se filme plutôt sobrement en lâche bellâtre et avec pas mal d'auto-dérision («Pourquoi tu fais toujours la gueule , tu crois que ça te donne l'air profond»).


Une douce promesse, je vous dis.

Japhy_Ryder
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le 25 sept. 2015

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Japhy_Ryder

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