" Mais si l'on ne peut pardonner, cela ne vaut pas la peine de vaincre."

Qu'est-ce que l'honneur, la religion, le pardon, la justice et la femme en Iran ? Asgar Farhadi, dont les films sortent enfin grâce au succès d' "Une séparation, répond à toutes ces questions à travers ses films haletants et poignants ("A propos d'Elly" magnifique drame sur l'honneur, "Une séparation").

Ici, la situation est dès le début inextricable et c'est à l'aide d'une mise en scène impecable (allers-retour entre Belle Ville, la maison du père de la victime et celle de la soeur d'Akbar), sans superflu et efficace qu'il en fait le compte rendu, sans rien dénouer mais en donnant les ficelles, les tenants d'un monde où la justice défaillante s'en remet au droit du tallion, où décider d'une vie revient au père meurtrie et harcelée d'une jeune fille assassinée par son petit ami d'à peine 18 ans que sa famille et son dévoué ami voudrait bien voir vivre.

Ajoutez à cela le prix d'un sang féminin qu'il faut racheter parce qu'il est infèrieur au prix d'un homme. Des hommes qui n'ont pas la part belle ici, entre alcoolique divorcé qui ne sert qu'à évité les gros lourds, médecin douteux qui a épousé sa seconde femme, c'est elle qui lui dit dans une scène poignante, pour lui servir de bonne, seul Ala (le nom porte toute la question du film: pardonner, oui, mais au nom de quoi, oublier, oui, mais comment. Si Dieu dit à la fois qu'il faut venger et pardonner alors comment faire ?) se détache du lot quand il se bat pour son ami, sans trop qu'on sache pourquoi, prêt à se sacrifier avant de retrouver face à la question qui traverse tout le film, qui en fait sa force : une vie humaine vaut-elle, pour nous et dans toute les situations, le prix du sacrifice de ceux que l'on aime.

Une mort vengée par une mort ?

Là où la justice défaille, les hommes se déchirent, incapables de trancher et déjà s'élève, chez Ala, quand il tourne le dos à l'amour, le parfum d'une défaite et derrière les murs de sa prison Akbar attend toujours une réponse, inlassablement sans que personne ne soit capable de la lui donner vraiment.
Bouleversant.
eloch
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le 27 juil. 2012

Modifiée

le 28 juil. 2012

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eloch

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