L'argument fantastique rappelle Your Name, à l'évidence. Tout comme cet amour déchiré par la séparation, élément des plus immuables de la filmographie de Makoto Shinkai. Mais réduire Les Enfants du Temps à une simple comparaison avec son grand frère serait une déception, d'autant plus qu'elle tournera immanquablement au désavantage du dernier-né.


Et même s'il faut avouer que Les Enfants du Temps s'avère moins fulgurant que son aîné, il n'en demeure pas moins des plus fascinants.


Il faudrait peut être aussi chercher, dans un premier temps, du côté du kiosque de The Garden of Words, qui abritait lui aussi les relations chères à Makoto Shinkai de cette pluie qui prend des allures de déluge biblique aujourd'hui.


La facture technique est toujours aussi léchée, le réalisateur nous livrant un nouveau festin visuel des plus magnifiques. Au service d'une urbanité débridée, décomplexée dans son envahissement publicitaire, consumériste et matérialiste sous le prisme de gouttes d'eau qui font figures d'autant de larmes ruisselant des joues du ciel.


Comme si la ville de Tokyo, morose, submergée, devait être sauvée. Faisant de la spiritualité tendance shinto un élément essentiel des Enfants du Temps. Comme cette sensibilité du premier amour, cette maladresse attendrissante, cet humour déjà présent dans Your Name, mais qui n'éclipse jamais la tendresse et la bienveillance que nourrira immanquablement le public envers le couple vedette. Juvénile. Fort. Délicat. Un amour naissant et fragile qui culminera dans une dernière partie lyrique, poétique, aérienne. Après avoir pris son temps pour le nourrir et l'irriguer des sentiments les plus purs et de l'enfance livrée à elle même mais allant toujours de l'avant.


Alors même que l'influence des adultes n'aura pourtant jamais été aussi prégnante que dans ces Enfants du Temps, représentant une menace et des enjeux dramatiques égaux en force avec le fantastique et le surnaturel convoqués. Cette influence neuve chez Shinkai empêche peut être son dernier effort de s'épanouir pleinement, le retenant quelque peu sur la terre ferme. Mais elle n'empêche cependant pas Les Enfants du temps de délivrer des images d'une poésie folle, même quand elle s'applique au béton de la ville. Une poésie qui se transcende dans la volonté éperdue de Hodaka à sauver l'élue de son coeur ou quand elle caresse le corps translucide et irisé de Hina.


Makoto Shinkai est donc loin d'avoir perdu son mojo : magique, envoûtant, fragile, lyrique, vibrant d'une lumière chaude et d'un idéal pur, d'un romantisme éperdu, son dernier effort s'impose comme une nouvelle réussite de la part de son réalisateur, toujours aussi inspiré et sensible, rajoutant cette fois-ci à son univers un propos un peu plus global, écologique, sur un monde immuable dans sa répétition face à l'existence humaine qui ne peut être que fugace et finalement minuscule.


Oui, Les Enfants du Temps est à l'évidence moins fulgurant. Mais il n'en demeure pas moins une fresque esthétique et romantique émouvante, sincère et moderne aussi pure qu'une goutte de pluie.


Behind_the_Mask, qui voudrait bien faire la pluie et le beau temps.

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le 8 janv. 2020

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