Greta Gerwig, auréolée du succès critique et public quelque peu exagéré de son premier film « Lady Bird », nous revient avec une nouvelle adaptation d’un roman très connu de Louis May Alcott, « Les Quatre filles du Docteur March ». On sent dans chaque aspect de cette relecture le besoin de rendre le récit moins poussiéreux et conventionnel et surtout de l’actualiser à l’heure où l’émancipation féminine est à l’ordre du jour comme jamais auparavant. Elle y parvient relativement bien en faisant ressortir la condition de ces jeunes filles à l’heure de la Guerre de Sécession ainsi que leurs aspirations personnelles dans une société où prédominent le mariage et la tradition de la femme au foyer. Même si le dénouement retombe dans la bienséance ayant cours à l’époque, ce qui semble d’ailleurs plus réaliste mais moins téméraire, il manque de points de vue contraires faisant comprendre la dure réalité de l’époque (hormis la tante et l’éditeur).
Tout cela reste donc bien gentillet et presque à l’eau de rose. On est loin, très loin, de « Les Liaisons dangereuses » par exemple pour ce qui est du pouvoir exercé par la femme dans une époque qui ne le permet pas. Gerwig a donc choisi de rester relativement sage et fidèle au matériau original. On suit les pérégrinations de ces quatre sœurs avec intérêt mais sans réelle passion, il faut le dire. Et le scénario (ou le montage ?) met en avant deux d’entre elles laissant les deux autres de côté, ce qui déséquilibre quelque peu le récit. Pourtant il y a un beau travail sur l’image et la mise en scène. Le rendu des couleurs automnales est magnifique tout comme le soin apporté aux costumes et à la décoration des intérieurs. Et la caméra de Gerwig est tout sauf statique ce qui rend « Les filles du Docteur March » en perpétuel mouvement surtout que le montage est plutôt alerte. Sur ce point, c’est assez réussi et cela enlève le côté académique et poussiéreux tant redouté pour ce genre de productions. Mais attention, encore une fois, ce n’est pas non plus le « Roméo et Juliette » de Shakespeare revisité en mode rock’n roll par Baz Luhrmann, pour citer un auteur dont on parle dans le film.
En dehors de ces menus défauts et qualités, « Les filles du Docteur March » souffre de deux défauts qui l’empêchent clairement d’être une excellente adaptation. D’abord et surtout, le choix de cette chronologie faite de flashbacks incessants et très mal délimités dans le temps. Avec comme effet de nous faire perdre le nord puis de désamorcer tout semblant d’émotion. Au début, on se dit que cela a été décidé de façon à ce que chaque scène du passé réponde à une du présent au sein du long-métrage. Au vu du résultat final, on trouve cela plutôt gratuit et ça n’apporte rien d’autre que la confusion pour le spectateur. Ensuite, l’énergie développée par ces jeunes filles vire parfois à l’hystérie. On a du mal à saisir ce que chacune dit au gré de dialogues débités en même temps et d’un perpétuel mouvement général usant sur le long terme. Au final, cette nouvelle mouture n’est pas désagréable et a le mérite de montrer encore une fois le talent du jeune Timothé Chalamet, encore plus que de ses partenaires féminines, mais reste imparfaite.
Plus de critiques cinéma sur ma page Facebook Ciné Ma Passion.