Pas toujours facile d'appréhender un film de Bergman. Il faut dire que le monsieur parle de tout. De la vie, de l'amour, de toutes les émotions... Et si certains de ses films le font à merveille (Cris et chuchotements, Sonate d'Automne)... D'autres m'ont passablement déçus voir énervés, par une certaine tendance à la métaphore complexe ou un peu hors propos, ou tout simplement parce que le sujet "support" ne m'intéressait pas (les forains dans le Septième Sceau)... Et donc voici les Fraises sauvages.

Je débarque dans ce film avec l'innocence d'un mec qu'a jamais vu un seul Bergman, le film commence. L'esthétique est assez neutre pour l'instant, mais déjà quelque chose me frappe. L'espèce de complicité mêlée à de l'amertume qui est développée entre Isak et sa servante m'a convaincu. Et quand Bergman réussit à me convaincre, c'est déjà pas mal.

Le reste est un succulent road movie (succulent comme ces fraises sauvages?) qui nous transporte un peu partout, mais surtout dans les souvenirs d'Isak, mélange d'amour et de haine, de passion et de froideur... Tout ceci est traité avec une grande fluidité, la mise en scène est sobre et efficace, le noir et blanc est sublimé lors des souvenirs d'Isak, les femmes sont de toute beauté... Et l'histoire, cette "rédemption" qui se fait en un jour (enfin, façon de parler, le dernier plan souligne bien que Isak ne peut se faire entendre par les auto-stoppeurs, comme s'il avait encore des efforts à faire avant de vraiment pouvoir s'ouvrir aux autres) est d'une sincérité remarquable. Les acteurs sont crédibles, la musique illustre parfaitement le sujet et puis Bibi Andersson... Merde quoi !

Bergman a réussi dans ce film là où il a pour moi échoué dans Persona ou Le Septième Sceau : Nous faire vivre un moment crédible et nous faire EN MÊME TEMPS réfléchir sur la vie, les sentiments, ... C'est là dedans que j'aime Bergman, et pas dans ses délires de drogués du genre "tiens jouons aux échecs avec la mort"... Enfin il se fait encore plaisir de temps à autre dans Les Fraises sauvages en calant des rêves hallucinants. Mais bon, ça va, ça dure pas trop longtemps.

J'avais carrément oublié de vous parler des personnages secondaires ! Pourtant ils sont très intéressants. Les auto-stoppeurs permettent d'amener dans le film ces réflexions métaphysiques dont Bergman raffole. La croyance est au cœur du récit, mais elle est amenée par des personnages qui arrivent un peu comme un cheveu sur la soupe. Et puis, l'ambiguïté du personnage féminin qui s'appelle Sara, j'adore. C'est traité avec une simplicité remarquable.

Bon, voilà un Bergman qui passe bien, pas de maux de ventres, pas de problèmes particuliers, allez zou, en voiture pour un autre Bergman (qui sera sûrement Saraband, j'ai hâte).
Ripailloux
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le 17 mai 2011

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