Je suis le Croque-Mitaine. Pour ne pas avoir aimer Les Garçons et Guillaume, à table ! Il faut, parait-il, soit être homophobe, soit être homosexuel (et voir l'homophobie du film), soit être un croque-mitaine. N'ayant aucun problème avec les pratiques sexuelles des autres, pas plus qu'avec mon désir sexuel tourné vers l'hétérosexualité, j'en ai donc conclu que je devais être le fils caché de Charles Manson et être un monstre.


Bon expédions dès le début les trois grands défauts du film avant de nous y attarder : je me suis ennuyé, je n'ai pas ris et j'ai trouvé le sujet aussi bien traité qu'une dissertation au brevet des collèges. Ca a peut être 18/20 mais ça ne vaut pas la peine que je le lise.


Pourquoi me suis-je ennuyé ? Là, je dois l'avouer, je pense que ça vient surtout de mon incompréhension. Certes, la part humoristique (sur laquelle je reviendrai) à beaucoup à jouer, ainsi que le fond également. Mais, finalement, c'est bien le fait que je ne comprenne pas immédiatement que Guillaume Gallienne se jouer lui-même à tous les âges de la vie qui a rendu le début difficile. Je le trouvais niais, débile, étrange. Il faut dire que Gallienne aurait pu (et peut être dû) en faire plus. Pourquoi ne pas se vieillir sur scène, dans le théâtre ? Il aurait suffit de changer la manière qu'à de parler la voix du comédien, en opposition à celle de l'enfant. Cela aurait été facile et aidé à la compréhension. Ou alors, maquiller moins la version adulte, après tout, les acteurs le sont toujours trop et ça les rend lisse. Bref, l'idée, très bonne au demeurant, de jouer tous les âges de la vie en même temps aurait été mieux travaillée, elle aurait été compréhensible dès le début et rendu ce même début plus séduisant.
Deuxièmement, l'aspect décousu et gratuit est très gênant et peine à convaincre. On ne sent pas de problématique, de liaison dans le film. La narration n'existe que pour amener des tableaux jamais reliés entre eux, si ce n'est pas le personnage central. Des personnages annexes sont amenés pour mieux être oubliés le tableau d'après et n'être plus mentionné.
Par exemple, le père de Guillaume ? Dès passé l'enfance, on l'oublie. Ses tantes disparaissent bien vite aussi. Sa grand-mère n'apparaît que deux fois et demande un développement. Je ne parle même pas de ses frères (l'un d'entre eux a voulu le tuer et rien n'est dit). Et son ami du collège ? On en parle aussi ? Tant de personnages non exploités. Là-dessus je me permets d'ailleurs de dire que ceux qui protesteront que c'est une auto-biographie sont des ignares. Une auto-biographie n'a de sens que si on veut connaître le personnage, or Guillaume Gallienne n'a rien fait pour qu'on mérite de le connaître. Non, il nous fait profiter de son expérience, de son vécu, pour amener une réflexion et un message. C'est quand même plus intéressant.


Donc voilà, le rythme narratif ne m'a pas trop convaincu. C'est l'enchainement plus que les tableaux qui m'ont peu séduit puisque, dans la forme, la qualité est au rendez-vous. De nombreuses bonnes idées (la pluie sur le balcon, la piscine). Cela dit, beaucoup de scène m'ont déplu également au niveau du pur esthétisme (au hasard, était-il possible de faire plus stéréotypé que la mise en scène de la boite gay?).


Pour l'humour, je dois avouer ne pas avoir vu le film comme humoristique. Déjà parce que lorsqu'on me parle de travestissement je ne vois pas où c'est drôle. Enfaite, pour être honnête j'ai mis longtemps avant de cerner quand est-ce que le film devait être marrant. Je crois n'avoir rit qu'à la comparaison entre le sexe de l'allemand et celui d'un étalon (et le « pense à l'Angleterre »).
Par exemple la scène du massage avec pénétration anale m'a laissé de glace. Je n'ai pas l'humour très compliqué mais là, que c'est lourd. Surtout que de manière générale le ton est plutôt sérieux, même si on parle de manière douce. C'est finalement très violent les propos du film et l'idée de poser gratuitement des blagues me gêne. Par exemple, les trois homosexuels qui veulent défleurer Guillaume de manière bien violente m'a absolument pas fait rire. Du coup, j'ai, semble-t-il, passé à côté de la scène. Elle était drôle parait-il. Pas pour moi. Du même coup, je n'y ai pas vu d'intérêt.


Enfin dans le fond le film me paraît pauvre au possible. Il est rempli de non-dit où le spectateur doit tout faire. Le passage de « je suis une fille » à « je suis un garçon » est beaucoup trop simple. Le fait que Guillaume se pense fille est dit mais sans jamais être expliqué. Rien de cela derrière, c'est triste au possible.
De la même façon, l'évolution adulte, lors de la rencontre avec Amandine est posée bien facilement, sans explication. On peut relever mille détail très simple. Le passage homosexuel/hétérosexuel est superficiel, sans profondeur. On a également l'impression que l'homosexualité c'est au mieux ridicule et obligatoire plus qu'envisager. De plus, Guillaume ne se dit pas bi (et pourtant, il a aimé un homme) mais bien immédiatement hétéro. D'autres l'ont dit mieux que moi, mais, de manière maladroite et sans le vouloir (car qui pourrait penser qu'il l'est) Guillaume Gallienne a des sous-propos homophobes. Aucune figure homosexuelle, par exemple, n'est traitée avec sérieux durant tout le film. Jamais Guillaume ne va voir un homosexuel pour parler, jamais.
Les changements de situations psychologiques sont posés, sans jamais être amenés. Le but est de nous montrer une nouvelle situation, un nouveau tableau.


Et c'est finalement là mon gros problème avec ce film : il ne fait que poser, sans montre aucune évolution, sans rien expliquer, sans rien donner à réfléchir. Ce film, en sommes, ne pense pas. Il est la preuve que le cinéma grand public, même s'il est traité par des gens doués, ne peut demeurer que superficiel sur certains sujets très profonds, et peut être trop sérieux pour être traités de manière à plaire à tout à chacun. Le film n'est pas absolument mauvais, mais je ne l'ai pas aimé. Les détails de forme agréable ne permettent pas de le justifier et il me paraît si vide, si creux à ne parler de rien et à juste montrer des scènes que je ne comprends pas son succès.
Jamais on ne comprend réellement quelque chose, tout est posé et le spectateur obtient sans penser. Pourquoi Guillaume se croit-il femme ? Certes, à la fin on donne une vague justification, mais non une raison technique. Où sont les raisons psychologiques, les avis, les constructions ? Où sont les hésitations, les doutes, les peurs ? Où sont les moments où Guillaume se définit et ne se définit plus ? Pourquoi passe-t-il de fille à garçon avec une si grande aisance ? Gallienne ne connait-il nullement les théories sur les genres ? Ou alors il simplifie trop sa propre vie.
Bref, ce film est bien vide et le public l'a certes bien rempli, mais il demeure trop creux pour moi.


Au passage, simple question/sondage :
La scène avec l'allemand homosexuel où on ne voit pas si Guillaume couche ou non avec lui, et où il dit qu'il a toujours eu peur de faire du cheval et que la seule façon de vaincre sa peur est de l'affronter. On est d'accord que le fait qu'immédiatement, l'enchainement avec une scène où il est à cheval, c'est la preuve qu'il a couché avec le blond, non ? Ou alors, Guillaume Gallienne doit revoir le langage cinématographique, car lorsqu'on me fait une liaison aussi forte entre le sexe masculin et l'équitation, qu'on fait une ellipse pour ensuite montrer Guillaume faisant du cheval, il me semble que c'est la façon la plus explicite (à part montrer l'acte même) de faire comprendre une scène de sexe.
Qui est d'accord ? Et qui ne l'est pas ?

mavhoc
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le 4 janv. 2016

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