Il y a quelque temps, Marvel créé la surprise avec Les Gardiens de La Galaxie Vol. 1. En confiant le film à l’amoureux du bis James Gunn, le studio avait permis l’éclosion d’une œuvre pulp et décomplexée (toute proportions gardées). Aujourd’hui, notre bande de joyeux fous furieux revient dans une suite qui se veut « bigger and louder », au risque d’y laisser un bout de son âme au passage ?
Team Rocket
Le début de ces nouvelles aventures est prometteur : un plan séquence inventif, une bestiole de l’espace digne de l’univers de Lovecraft, une BO rétro tarantinesque… Nos retrouvailles avec ces Gardiens s’annoncent des plus jouissives. D’autant que le premier volet, bien qu’assez imparfait, possédait quelque chose de malheureusement pas toujours présent dans l’industrie du blockbuster hollywoodien : une âme. James Gunn, en véritable auteur, avait su imposer sa pâte au géant américain Marvel et, en digérant son amour pour le cinéma de genre, donner naissance un space opéra coloré des plus sympathique. Savoir retrouver l’esprit de l’original tout en proposant quelque chose de novateur, parvenir à faire évoluer des personnages déjà établis… Tout cela n’est pas une mince affaire. Et si Gunn n’opte pas toujours pour la bonne approche, il maintient cependant le cap émotionnel qu’il s’est fixé tout en soulevant des réflexions intéressantes sur les thèmes de la famille et de relations « humaines ».
Il ne fait aucun doute que le réalisateur aime ses personnages. En 2014, il nous avait introduit à ces êtres torturés et sociopathes, qui, ensemble, finissaient par trouver la famille qu’ils n’avaient jamais eu. Comme on ne change pas une équipe qui gagne, la plus grande qualité de ce Gardiens de la Galaxie Vol. 2, est de replonger le spectateur au sein de cette famille de cœur, dysfonctionnelle mais touchante. Mais toute la tendresse que Gunn leur porte le pousse, ici, à aborder une approche parfois « sériesque » qui atténue grandement la force d’un scénario pourtant intéressant, explorant les mystères de la filiation de Peter Quill (Chris Pratt). Car il est évident que ce qui intéresse le cinéaste ici, ce sont les tourments intérieurs de ses personnages. Chacun, à sa manière, étant enfermé dans un processus mental lié à sa condition et son vécu, l’empêchant d’atteindre une paix intérieure et une profonde empathie envers l’autre. Le parallèle entre Rocket et Yondu est, à ce titre, fascinant et très bien vu, tout deux se trouvant enfermés dans des mécanismes de défense répondant à leur peur d’être aimé.
Faux Mouvement
Il est cependant dommage que le long métrage ne parvienne jamais vraiment à allier cette exploration émotionnelle au déroulement de son histoire. Ainsi, il n’est pas rare que l’intrigue fasse du surplace lors de séquences entières et nombreuses sont les scènes qui pourraient être retirées sans changer de façon significative la trame principale du film. L’exemple le plus frappant reste probablement tout le fil narratif de la mutinerie des Scavengers, qui se retrouve finalement n’être qu’un prétexte pour fournir une scène d’action forçant le trait de l’anthologie. Mais le culte ne vient jamais à celui qui le recherche, il est le résultat d’un cri du cœur de l’artiste qui propose sa vision sans aucune concessions ni arrières pensées marketing. Les Gardiens de la Galaxie premier du nom s’articulait autour d’ un scénario on ne peut plus classique. Et si le film se révélait maladroit par moments, il allait dans une direction donnée avec une véritable énergie et des enjeux dramatiques et émotionnels bien établis. L’erreur, ici, est de tomber par moment dans le piège facile de la suite « over the top », où ce qui faisait le charme du film originel se retrouve gonflé au point d’en faire un gimmick agaçant. Tous les défauts du premier segment sont ici accentués et l’approche parfois hypocrite transforme le scénario en un objet bancal, éclaté et dilué. Comme on le sait, le trop est l’ennemi du mieux et, par exemple, là où l’humour du premier, même si envahissant, faisait parfois mouche, le nombre indigeste de blagues à la minute dans ce second volet désamorce le vrai potentiel humoristique de la chose.
Un autre exemple de ce « trop plein » est l’usage de « plans catastrophes » sur terre, lors de l’habituelle scène d’action/combat/explosion finale (ça aussi, il va falloir arrêter) dont l’unique utilité est de renforcer artificiellement les enjeux dramatiques. Il est néanmoins agréable de constater que Marvel arrive encore a sortir des films existant en tant que tel et qui ne se posent pas uniquement comme un géant spot publicitaire de son univers cinématographique. Les Gardiens de la Galaxie Vol. 2, tout comme son aîné, est une œuvre à part entière et, même si elle s’inscrit dans l’univers commun du studio, respire en tant que film et développe ses propres thèmes avec sa propre esthétique. Ce qu’il faudra retenir, en fin de compte, de cette épopée pulp et colorée, c’est la lutte de chaque personnage pour vivre avec ses fêlures émotionnelles souvent liées à des traumatismes familiaux (Peter et la mort de sa mère, le passé tumultueux de Gamora et Nebula…) ou à un abus de la société dû à sa condition (Rocket et les expériences de laboratoires qu’il a subit). Chacun devra ainsi savoir briser le cocon aveuglant de sa douleur et de sa propre culpabilité.
Les Gardiens de la Galaxie Vol. 2 a tendance à confondre générosité et gavage. Cependant, malgré ces nombreux défauts, on ne peut s’empêcher de sortir de la salle avec la sensation d’avoir passé un vrai bon moment. Parce que, le film de James Gunn, sous ses couches racoleuses, a du cœur. Un cœur qui n’a jamais battu aussi fort que lors d’un plan final inattendu et pourtant évident. Un ultime tableau touchant dans lequel le personnage le plus réussi de cette saga enlève son armure sentimentale pour ouvrir son âme et laisser échapper une larme.
critique originale : https://www.watchingthescream.com/hooked-on-a-feeling-critique-des-gardiens-de-la-galaxie-vol-2/