J’avais commencé la filmographie de Béla Tarr avec Le Tango de Satan et depuis j’appréhendais ses autres films. En effet Le Tango de Satan bien qu’excellent souffre de sa longueur et peut par moments ennuyer le spectateur. Mais autant le dire tout de suite, Les Harmonies Werckmeister fut une véritable claque cinématographique qui ne m’était pas arrivé depuis un bout de temps.

Le film est composé de trente-neuf longs et magiques plans-séquences, certains plus réussi que d’autres mais qui restent dans l’ensemble excellent. Notamment le tout premier plan lors de la fermeture du café, le propriétaire ouvre la porte du poêle et éteint le feu, Janos, simple facteur et protagoniste de ce film débute alors une danse planétaire et merveilleuse, faisant danser les clients et transformant l’ensemble en une éclipse solaire qui est un de mes instants cinématographique préféré.

Aux premiers abords, j’ai trouvé l’histoire assez floue voir incompréhensible. Je me suis repassé certaines scènes plusieurs fois car j’avais le sentiment de ne m’être plus laissé emporter par la beauté et l’intelligence technique que par le fond.
On se retrouve donc dans un petit village, perdu au fin fond de la Hongrie. Un cirque ambulant, ayant pour attraction un prince et une baleine empaillée s’installent au milieu d’une grande place. La baleine, monstre marin fantasmé et maintenant dénaturée met alors fin à toutes espérances. La baleine devient ainsi objet de manipulation et amplifie les tensions pour finalement créer un véritable chaos.

Les Harmonies Werckmeister est un film essentiellement silencieux, reposant sur les paroles des personnages et le bruit environnant. Mais par moments, lors de certaines scènes les pianos et les violons de Valuska viennent se poser sur ce film et, entre morosité et mélancolie, donne une réelle force émotionnelle à ces instants.

La plus grande force de ce film est la mise en scène avec tous ces longs et magiques plans-séquences que Béla Tarr à l’habitude de nous livrer. Notamment en jouant de ces décors naturels et délabrés, et de la lumière pour un film en noir et blanc ajoutant une impression d’irréelle.

Le seul défaut que je pourrais trouver à ce film serait certaines longueurs à l’image du Tango de Satan mais qui heureusement pour ce film ne gâche rien au plaisir du visionnage et à sa contemplation.

Béla Tarr par ce film nous expose la dégénérescence des villages d’Europe de l’Est lors de la guerre froide. Isolés et oubliés où les tensions sont omniprésentes et où un rien peut se transformer en une vague dévastatrice de violence.

Il est difficile de poser les mots sur une telle œuvre, troublante et grandiose, je pense qu’il faut avoir vu plusieurs fois ce film pour pouvoir le comprendre parfaitement.
Merci Béla Tarr pour ce grand moment de cinéma.
Mashiro
10
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le 25 juil. 2014

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Mashiro

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