Malgré ses multiples nominations aux Oscars, Martin Scorsese n’avait pas encore gagné celui du meilleur réalisateur, qu’il remporta grâce à ces Infiltrés, qui réalisèrent une razzia à la cérémonie 2007. Alors, mérité ?
Remake libre (pas tant que ça, en fin de compte) du chef d’œuvre hongkongais de 2002 Infernal Affairs, Les Infiltrés (dont le nom en VO rapproche beaucoup de défunts, de manière religieuse) s’inscrit dans la grande tradition des fresques policières, tragique et violente. La mise en scène de Scorsese est bien plus posée que celle du film original, multipliant les symboles comme le rat et les gros plans (malheureux) sur James Badge Dale en arrière-plan comme pour signifier qu’il a lui aussi un rôle à jouer dans le climax, il arrive aussi à rendre les scènes musclées passionnantes et son utilisation de la musique est à tomber. En effet, l’utilisation de Gimme Shelter des Rolling Stones, titre récurrent du film, est à la limite de la perfection, surtout pendant la présentation, presque épique, du personnage de Jack Nicholson.
En ajoutant une heure au film original, afin d’approfondir beaucoup plus les personnages, là où le film d’Andrew Lau & Alan Mak allait à toute berzingue pour plonger son personnage dans l’Enfer du titre, William Monahan (récompensé lui aussi par un Oscar) crée un manichéisme un peu décevant, le seul défaut du film. En effet, Matt Damon, étrangement falot, est un vrai méchant, sans aucune once de bienveillance, alors que Leonardo DiCaprio, parfait au demeurant, ne questionne presque jamais son appartenance aux flics. Le reste du film reste quand même très bien écrit, avec des personnages, hauts en couleur et inoubliables, tant par la qualité de leurs acteurs (Mark Wahlberg et Alec Baldwin en tête, fantastiques, Jack Nicholson, jouissif cabotin et vraiment flippant et Mark Rolston, un tout petit temps d’écran, mais une vraie présence) que par l’écriture.
Malgré tous ces petits défauts, Les Infiltrés est un film inoubliable, porté par une mise en scène virtuose et une musique à tomber. Flamboyant, le film va crescendo et marque le spectateur au fer rouge.