J’allais à reculons voir le dernier Cronenberg, et j’avais raison. History of Violence m’avait beaucoup déçu, et celui-là ne fait pas exception, il est pourrait-on dire, du même tonneau. Il y a toujours Viggo Mortensen, toujours la femme blonde (cette fois-ci Naomi Watts), toujours le passé qui remonte à la surface.

Ce qu’il y a toujours, aussi, c’est cette écriture comics qui plonge le film, pourtant superbement filmé, dans le ridicule : les situations sont convenues (quand elles ne sont incroyablement irréalistes), les dialogues sont prévisibles trois répliques à l’avance, et le talent des comédiens (Viggo, la Blonde et Armin Mueller-Stahl) ne fait rien à l’affaire. Les personnages ressemblent à des icônes, et ne prennent que rarement vie.

Mais surtout, le plus grave, c’est que Cronenberg s’est définitivement embourgeoisé. Où est passé le cinéaste de Crash, Dead Ringers, Videodrome ? Les histoires qu’il filme désormais sont des polars mal dégrossis, qui supportent difficilement la concurrence (j’échange volontiers une scène des Sopranos contre les 4 dernières heures de Cronenberg).

Ici, on tourne au mélo le plus ridicule qui soit. Pour pimenter la sauce, Cronenberg fait mine de jouer dans la cour du gore, mais ce n’est que pour épater le bourgeois : « Ouh lala ! Il lui tranche la gorge ! Et on voit drôlement bien le sang qui coule !! » « Ouh la la ! Viggo se bat tout nu ! Et on voit ses roubignolles !!! », ad lib.

Comme le disait Scorsese, la violence ne sert à rien au cinéma si elle ne porte pas en elle un profond dégoût, et une morale. Ici, on sent que des réminiscences du cinéma disparu de Cronenberg. Le reste n’est que conformisme.
ludovico
3
Écrit par

Créée

le 29 mars 2014

Critique lue 1.5K fois

7 j'aime

10 commentaires

ludovico

Écrit par

Critique lue 1.5K fois

7
10

D'autres avis sur Les Promesses de l'ombre

Les Promesses de l'ombre
Cultural_Mind
8

Le jeu des familles

Il suffit à David Cronenberg de deux scènes inaugurales pour injecter dans Les Promesses de l'ombre ce qui constituait l'essence de son chef-d'oeuvre A History of Violence, sorti deux années plus...

le 10 août 2017

39 j'aime

Les Promesses de l'ombre
Lazein
6

White russian

Sage-femme, Anna assiste la naissance d'un bébé qui échange sa vie contre celle de sa mère adolescente. Déterminée à établir l'identité de la jeune junkie défunte et trouver un lien familial pour...

le 22 nov. 2013

39 j'aime

9

Les Promesses de l'ombre
Buddy_Noone
8

L'homme illustré

Après La Promesse des ténèbres (roman de Maxime Chattam) et La Prophétie des ombres (film de... je sais plus), voici Les Promesses de l'ombre, qui n'a absolument rien à voir. Anna (Naomi Watts),...

le 6 oct. 2014

22 j'aime

8

Du même critique

Shining
ludovico
9

Le film SUR Kubrick ?

Après le flop public et critique de Barry Lyndon, Kubrick a certainement besoin de remonter sa cote, en adaptant cet auteur de best-sellers qui monte, Stephen King. Seul Carrie a été adapté à cette...

le 7 févr. 2011

191 j'aime

86

La Neuvième Porte
ludovico
9

Un film honteusement délaissé...

Un grand film, c’est quoi ? C’est un film qui passe sur NRJ12 (en VF mal doublée), qu’on prend au milieu, et qu’on regarde jusqu’au bout, malgré l’alléchant Mad Men S05e1 qui nous attend sur Canal à...

le 23 janv. 2011

58 j'aime

3

Borgia
ludovico
3

on y a cru pendant vingt secondes, jusqu'au générique...

C'est parti pour la série événement de Canal+. Ils sont forts chez Canal, ils ne font pas de série non-événement ! Mafiosa, Braquo, Borgia : même combat. Pour cette dernière, on y a cru pendant vingt...

le 14 oct. 2011

41 j'aime

13