Œuvrant pour le cinéma espagnol depuis le début des années 90, Alex de la Iglesia s'est forgé son identité en mêlant violence et humour noir. Après une expérience internationale (Crimes à Oxford) à l'accueil plutôt mitigé, le réalisateur était revenu dans son pays natal pour réaliser Balada triste et Un jour de chance, respectivement sortie au cinéma et directement en DVD en France.
En gestation depuis près de 20 ans, l'idée de narrer une histoire de sorcelleries dans le lieu même où est né le mythe ne suffisait pas pour l'auteur apparemment. Naquit de cette volonté de départ, une comédie horrifique sur fond de guerre des sexes.

Passé un générique alignant les représentations artistiques de différentes femmes supposées être des sorcières, dont Angela Merkel, on assiste au vol d'un magasin rachetant de l'or par des personnages atypiques. Ainsi pendant que Bob l'éponge, Patrick, Mickey, Mini et l'homme invisible montent la garde, Le Christ et un soldat vert dérobe le butin. L'ensemble est rythmé et donne le ton global de la bobine : un jeu d'équilibriste pour l'auteur afin d'allier humour et action dans une même séquence.
Toute la première partie permet de nous présenter nos braqueurs : des loosers incapables de gérer leur relation avec la gent féminine. Ce point commun donne lieu à de grandes discutions sur le pouvoir de celle-ci et le jeu vicieux auquel elle s'adonne pour torturer les mâles. Cette misogynie ambiante va bien sûr être mise à rude épreuve par la suite lorsqu'il faudra faire face à leur plus grande peur : la Femme.

La bobine déborde d'idées humoristiques. Le réalisateur joue sur deux registres : le comique de répétitions et le comique de situation. Le premier, né dans le plaisir que l'on éprouve à voir un des protagonistes subir tout au long du film diverses mésaventures. Le second se retrouve dans différentes scènes, le braquage ou la dispute conjugale avec une sorcière sont deux exemples parmi d'autres. On peut aussi noter les courses-poursuites à la Benny Hill se déroulant dans la gigantesque demeure.

Pour autant réduire Les sorcières de Zugarramurdi à ce registre serait une erreur. En effet, le réalisateur combine différents genres : la comédie donc, mais aussi l'épouvante et le policier.
Là où le second est évidemment légitime et parfaitement maîtrise, le dernier de la liste est tout son contraire. En effet, l'enquête policière est loin d'être passionnante et les personnages de cette trame sont pour le moins dispensables. L'histoire ne souffrirait pas de l'absence de ce duo de flics, mais il ne dessert pas pour autant le récit.
Concernant la sorcellerie, on sent que le réalisateur maîtrise son sujet. Il nous le montre d'ailleurs en distillant ci et là quelques informations au grès des conversations. L'univers décrit est, de ce fait, crédible puisque se basant sur des faits historiques, et parfaitement compréhensible même pour des novices en la matière.

Avec sa structure narrative rappelant celle d'Une nuit en enfer, sa mère supérieure improbable à la nudité indécente, ses combats aériens dignes des péloches d'arts martiaux chinois et son humour qui fait mouche à chaque fois, Les sorcières de Zugarramurdi est une œuvre unique dans le paysage européen actuel. On pourra lui reprocher d'être un peu trop généreux ce qui amène d'ailleurs à une séquence final légèrement bordélique, mais si le cinéma occidental regorgé plus d'œuvres de ce style, il se porterait bien mieux.
Présent dans à peine 100 salles en France, il ne faut pas traîner si vous voulez avoir le privilège de découvrir cette œuvre sur grand écran.
tzamety
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le 14 janv. 2014

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