Ne pas aimer un film, c’est une chose, le détester au point de ressortir de la salle dépité et maugréant dans le métro du retour, c’en est une autre.

Les Voies du Destin s’ouvre sur cette phrase aussi prometteuse qu’une inscription « Fumer tue » sur un paquet de clopes.

« D’après une histoire vraie. »

Deux options, lorsque ceci apparaît en début de film : soit on va assister à un cours plus ou moins magistral d’histoire, et donc plus ou moins intéressant, soit il va s’agir de subir une relecture exagérée de faits qui sont sûrement arrivés, façon best-off légitimé par le label.

Il est donc question ici de la guerre (mal), et d’américains (gentils) faits prisonniers (mal) à Singapour par des japonais (méchants). Il est question, 20 ans plus tard, des retrouvailles entre un ancien prisonnier et son bourreau.

Efficace sur le papier, le pitch n’en est pas moins américain, donc sans trop de suspense quant à son final. Oui, il y aura des violons, mais après tout, pourquoi pas ?

Le principal défaut du film, si l’on omet son côté manichéen et donc certainement involontairement extrêmement raciste, réside dans son montage, qui pose un vrai problème. En effet, le quasi novice réalisateur Jonathan Teplitzky choisit de mêler ses deux temps de récits, d’aller à l’encontre du pardon progressif de son personnage principal. Parce que quand on voit Colin Firth (deux expressions, soit deux fois plus que Nicole Kidman) commencer à baisser la garde face à son ex-bourreau, on se retrouve illico sur les japs torturant le pauvre garçon. Et le spectateur de se sentir frustré qu’il ne lui colle pas son poing dans la gueule a posteriori.

C’est un process malhonnête dangereux que celui de frustrer un spectateur plus que ne l’est le héros d’un film. Nous voici en effet dans cette position inconfortable de partisan de la peine de mort, tandis que ce bon samaritain de Colin Firth baisse la garde au fur et à mesure que le film avance.

Ajoutez à cela de gros problèmes de balance des blancs lorsque Nicole Kidman est à l’écran (la sur-exposer est une solution pour la faire paraître naturelle, semble s’être dit le chef opérateur, pas con) et une entrée en matière digne des pires romans de gare (ils se rencontrent, ils se revoient, ils s’embrassent, ils se marient, et l’on évacue le problème de l’amour fou à figurer à l’écran), vous obtiendrez une bouillie immonde et assez limite calibrée pour émouvoir le badaud façon téléfilm d’M6.
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le 10 juin 2014

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