Les Yeux sans visage par STEINER
S’il existe dans le cinéma français une tradition bien ancrée du merveilleux, de Méliès à Cocteau, on ne peut guère citer de grands auteurs se réclamant du fantastique, en dehors de George Franju.L’insolite, l’étrange, l’angoisse sont ses marques de fabrique, mais il se signale aussi par une rigueur d’écriture, une fluidité narrative, un attachement aux décors et aux objets qui trouvèrent d’abord leur champ d’expression naturelle dans le documentaire.Passant à la fiction il ne perdra pas cette acuité du regard lié à un fort tempérament de visionnaire, ce gout du mystère en lien avec la fascination.Dans les « yeux sans visage » il semble pasticher au départ quelque film expressionniste allemand, pour nous faire basculer tout à coup dans le plus glacial réalisme.Ce qui frappe le plus en effet ici, ce ne sont pas les docteurs sadiques, les souterrains obscures ou les cimetières profanés, mais une DS noire entrant dans la cour de la morgue, des bistouris creusant une plaie, la nécrose d’un greffon de chair humaine.Nulle complaisance dans l’horreur, mais un figement de la forme, proche de la catalepsie.Un noir et blanc clinique contribue de beaucoup à l'effet d'envoutement que procure cette œuvre.