Ce cousin de Slumdog Millionnaire (reprenant Dev Patel, consacré dans son rôle d'indien oscarisable de service à Hollywood) se déroule en deux grandes parties. La première est de loin la plus riche, capable de produire de la surprise et même d'un certain engagement (par rapport aux disparitions d'enfants, à la pédophilie qui s'en réjouit, puis plus généralement aux aléas propres aux miséreux d'Inde). Elle fait du spectateur une petite souris accrochée à un enfant perdu suite à une fugue de trop avec son frère, effacé dans la foulée. Dans la seconde partie Sarro a la vingtaine et se met sur la piste de ses origines, à un moment où les repères de sa vie passée sont enterrés (crise de la mère, désertion du frère adoptif, vie amoureuse et cheminement professionnel).


Le temps de l'adoption sert de transition à ces deux gros morceaux et appartient encore au premier, qualitativement parlant. Sur le plan émotionnel le résultat a les moyens d'être une bombe, sur le reste il est presque confus. Sans le classicisme et la force de la mise en scène, il sombrait dans la bouillie. Le développement est parsemé d'ellipses sinon de trous, peut-être par pudeur par rapport à la source – based on a true story comme indiqué en fermeture, avec les images des retrouvailles et un épilogue réel. La seconde partie crache tout très vite et se jette dans les caricatures et grands élans lacrymaux, avec talent mais en laissant perplexe en terme de substance et de psychologies particulières.


Lion néglige les raisons de tout, y compris du sursaut d'intérêt tardif de Sarro pour ses origines. Le film ressemble au catalogue d'une vie en deux tomes mais avec des pages arrachées. Il est très bon à poursuivre des moments magiques – son happy end en a l'étoffe. Enfin en une confession de la mère adoptive (australienne jouée par Kidman, elle-même issue de ce pays) le film arrive à placer une idéologie bien définie, voire à la relier à une aigreur commune. Les louanges à la famille alternative de mode humanitaire ne suffisent pas, il faut encore que la foudre s'abatte sur le modèle traditionnel, avec la vieille antienne du père alcoolique incestueux (ce qui fait relativiser les onces de courage du film entre l'arrivée à Howrah et le sauvetage grâce à l'orphelinat).


https://zogarok.wordpress.com/2017/03/14/lion-2017/

Zogarok

Écrit par

Critique lue 1.9K fois

5

D'autres avis sur Lion

Lion
Meuk-Meuk
4

Une bonne histoire vraie ne suffit pas à faire un bon film

Le problème avec les films "basés sur une histoire vraie", c'est que, souvent, ils partent du principe que, puisque c'est vrai, c'est crédible. Sauf qu'un film doit nous faire adhérer à son histoire,...

le 24 févr. 2017

52 j'aime

4

Lion
MathiasBaum
8

La genèse d'un monde #GoogleEarth

Lion est le premier film de Garth Davis, et le moins que l'on puisse dire, c'est que pour un premier long métrage, il s'agit d'une réussite! Un enfant de 5 ans vivant dans une pauvreté extrême, mais...

le 31 janv. 2017

42 j'aime

4

Lion
MDCZJ
8

A la recherche du temps perdu ...

Le Lion, ce bel animal, grand, féroce, doté d'une crinière de feu, semblable au soleil. Il est le roi des animaux, celui qui inspire le respect. Le film de Garth Davis aurait pu emprunter son titre...

le 25 févr. 2017

32 j'aime

3

Du même critique

La Haine
Zogarok
3

Les "bons" ploucs de banlieue

En 1995, Mathieu Kassovitz a ving-six ans, non pas seize. C'est pourtant à ce moment qu'il réalise La Haine. Il y montre la vie des banlieues, par le prisme de trois amis (un juif, un noir, un...

le 13 nov. 2013

48 j'aime

19

Kirikou et la Sorcière
Zogarok
10

Le pacificateur

C’est la métamorphose d’un nain intrépide, héros à contre-courant demandant au méchant de l’histoire pourquoi il s’obstine à camper cette position. Né par sa propre volonté et détenant déjà l’usage...

le 11 févr. 2015

48 j'aime

4

Les Visiteurs
Zogarok
9

Mysticisme folklo

L‘une des meilleures comédies françaises de tous les temps. Pas la plus légère, mais efficace et imaginative. Les Visiteurs a rassemblé près de 14 millions de spectateurs en salles en 1993,...

le 8 déc. 2014

31 j'aime

2