Les films de super héros sont arrivés à un nouveau tournant. Ils sont désormais synonymes de recettes dépassant le milliard de dollars mais sont également fustigés par une partie des cinéphiles qui, sans renier leurs qualités intrinsèques, commencent à ressentir une forme de lassitude, voire même un agacement quant à l'absence de prise de risques. Si je continue à approuver la grande majorité des métrages super-héroïques, je ne peux que comprendre ce sentiment car je me pose toujours cette question : et maintenant, que faire de plus ? Que dire de plus ? En ce sens, s'il ne révolutionne rien (mais il n'a jamais prétendu le faire), Logan offre une respiration bienvenue.


Pourtant, ce n'était pas gagné, et pas uniquement à cause de l'overdose de longs métrages. Le premier film consacré à Wolverine fut conspué pour son traitement bâclé du héros et de ses acolytes, donnant l'impression d'un film n'existant que pour surfer sur la popularité du personnage et non pour le faire briller. Le second (que je n'ai pas encore vu à l'heure où j'écris ces lignes) semblait déjà plus convaincant, mais n'a pas réellement marqué les esprits. Il y avait donc de quoi être dubitatif face à l'annonce d'un troisième volet, même si celui-ci se présentait comme l'ultime aventure incluant Wolverine, Hugh Jackman passant enfin à autre chose. Les bande-annonces commençaient à nous rassurer, même s'il est assez facile d'offrir un trailer de qualité avec du Johnny Cash. Wait and see donc.


Comme prévu, le film est loin d'être parfait. Le rythme n'est pas toujours bien géré, il y a certaines répétitions scénaristiques dommageables et Marvel n'arrive décidément pas à nous offrir des bad guys de qualité. Même le twist à ce sujet tombe à moitié à plat car paraissant quelque peu artificiel. Enfin, le film profite clairement de son statut "R" (interdit aux moins de 17 ans non accompagnés aux Etats-Unis) et charge un peu trop la mule niveau violence. Non pas que cette violence ne soit pas appréciable en tant que spectateur et nécessaire dans le contexte du film mais elle me donnait parfois l'impression que le film me tapait sur l'épaule pour me dire "T'as vu, je suis classé R, je peux être bien plus violent que les autres films Marvel, t'as vu hein ?" Deadpool, bien qu'un poil artificiel à ce sujet, n'était pas aussi violent, atténuant donc en partie ce défaut.


Mais un très bon film arrive à faire passer ses défauts au second plan si ses qualités les compensent suffisamment, ce qui est le cas ici. Ce qui frappe bien entendu, c'est son côté plus réaliste, presque terre-à-terre, si bien qu'on oublie presque que c'est un film de super-héros. Et justement, dans ce film, les mutants ont presque tous disparus. Ils sont même désacralisés entre un Logan au corps meurtri et un Charles-Xavier de plus en plus absent mentalement. Et si Logan garde un certain cynisme quant à cette notion de héros, le film en lui-même ne l'est absolument pas. Il conserve même une part de malice lorsqu'il brise le quatrième mur, avec ces comics X-Men inspirant la jeune mutante. Preuve s'il en est que ce medium fait encore rêver, même si, comme le dit Logan, ils ne rapportent qu'un quart de ce qui s'est vraiment produit. Tel les autres films Marvel, qui ne retranscrivent que partiellement l'essence des comics selon les puristes.


Cet hommage est d'autant plus juste qu'il fait écho aux précédents films X-Men sans directement les citer, ce "Logan" étant une histoire à part. Ce qui est une bonne chose, tant la chronologie X-Men est bordélique et plombe malgré elle certains films de la saga (c'est d'ailleurs le principal défaut de Days of Future Past à mes yeux). Ainsi, on peut voir ce Logan sans forcément avoir vu les précédents films mais son impact sera forcément plus grand si on suit les aventures de Serval depuis le début. Après tout, il s'agit du chant du cygne.


Au delà donc de la violence et de la brutalité du film, il était donc logique d'achever sur un opus mélancolique et touchant, où les rapports entre Charles-Xavier, X-23 et Logan participent grandement à l'émotion. Ceci tout en insérant quelques touches d'humour ici et là qui paraissent parfaitement naturelles, là où d'autres pestent sur le côté artificiel du second degré Marvel dans le MCU. Tout cela permet donc de passer sur les défauts du film et d'en faire une certaine anomalie dans le catalogue Marvel.


Car c'est là la principale qualité de ce film : il est à l'image de son héros, à savoir bestial, violent, brut de fonderie mais avec un gros cœur qui bat. Wolverine est l'un des héros Marvel les plus populaires du lot car il est au final l'un des plus humain. A travers ce film, il symbolise justement tout ce qu'un être humain est ou peut devenir. Quelqu'un qui, à la base, n'est pas mauvais mais qui fut très souvent à deux doigts de passer du côté obscur à cause de son vécu et de ce qu'il renferme. Quelqu'un qui n'est pas nécessairement le plus sympathique mais qu'il est facile de prendre en affection. Quelqu'un qui possède une part animale qu'il s'assume quand les circonstances l'imposent mais qui au fond, la porte comme un fardeau. Quelqu'un qui a fait autant de bien que de mal autour de lui mais a laissé sa marque et dont on se souviendra encore longtemps.


Alors certes je n'ai pas versé de larme à la fin, certes j'ai parfois trouvé le temps long sur ce film mais ce qui sauve certaines œuvres par rapport à d'autres, c'est leur honnêteté. Ce film est honnête, même brutalement honnête. Ce film est Wolverine.

Masta21
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Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Journal de bord d'un retardataire en matière de cinéma (2017)

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le 5 mars 2017

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