Comment a-t-on osé faire un film de "Lolita" ? C'est bien la question que tout le monde se posait surtout quand on sait que le roman de Vladimir Nabokov dépeint la relation unissant Humbert Humbert, adorateur de nymphettes et Lolita, âgée de 12 ans. Impossible à voir sur l'écran surtout en 1962. Mais Stanley Kubrick, aidé de Nabokov en personne au scénario, s'y attaque. Bien évidemment, Lolita devient plus âgée (elle est interprétée par l'inoubliable Sue Lyon alors qu'elle avait 15 ans) et tout baiser ou relation sexuelle entre elle et Humbert est proscrit. Reste un sens de la suggestion habilement maîtrisé par Kubrick et même si ce qui pouvait paraître sulfureux à l'époque est un peu atténué aujourd'hui, cela n'en reste pas moins osé surtout quand on voit à quel point Humbert est fou de Lolita, à la fois être pervers, extrêmement romantique mais aussi pathétique. Dans ce rôle, James Mason est tout simplement admirable, trouvant là une des meilleures prestations de sa carrière, arrivant à jongler entre toutes les nuances de son personnage. Pas forcément toujours fidèle au roman (le personnage de Clare Quilty y prend une plus grande importance, incarné dans toute sa démesure par l'excellent Peter Sellers), "Lolita" est néanmoins une œuvre superbe, osée et complexe qui doit beaucoup au sens de la mise en scène de Kubrick, qui n'est plus à présenter.