Looper : Rian Johnson, roi du mash-up !

En 2006, Rian Johnson posait avec Brick les jalons d’un cinéma éminemment personnel dont la grande force résidait dans sa propension à mélanger les genres pour mieux créer un univers totalement inédit. En l’occurrence il s’agissait là d’un habile mix entre les romans de Raymond Chandler et les films de John Hugues. Déjà porté par un Joseph Gordon-Levitt habité, il amena à se pencher plus en avant sur le cas d’un cinéaste plein d’avenir. Deux ans plus tard, le plus anecdotiques Une arnaque presque parfaite fait retomber le soufflet quasi instantanément. Dès lors se posait la question de savoir si Johnson allait pouvoir rebondir et réaffirmer sa singularité.

Deux épisodes de Breaking Bad plus tard (et pas des moindres), Looper répond par l’affirmative à cet épineux questionnement et assoit le cinéaste comme le maitre incontesté du mash up cinéphilique premier degré et ultra référencé (pour le second degré le king indétrônable reste Edgar Wright). En faisant s’entrechoquer les codes du polar et ceux de la science fiction, le cinéaste renoue avec cette originalité qui avait rendu Brick si fascinant malgré ces quelques défauts. Dans le monde de Looper, les portes flingues défient les lois du temps pour imposer la loi d’une mafia qui aime bien se débarrasser des collaborateurs passés et futurs. Soit l’histoire de Joe (Joseph Gordon Levitt), tueur de son état dont le job consiste à éliminer des cibles qui lui auront été envoyées depuis le futur. Un boulot comme un autre diront certains mais qui tend à se compliquer quand votre victime s’avère être… vous même avec trente ans de plus dans la tronche ! Il n’en fallait pas plus à Joe pour laisser filer sa cible (é) mouvante ressemblant furieusement à Bruce Willis.


A bien des égards, Looper renvoit au meilleur du cinéma d’Andrew Niccol dans cette capacité à dépeindre un futur anxiogène et en voie de déshumanisation. Sauf que contrairement à ce que le réalisateur de Bienvenue à Gattaca nous a récemment poundu (Time Out pour ne pas le citer), Johnson parvient à rester totalement cohérent avec son concept à priori tordu, via des dialogues ciselés éludant en quelques mots ce que d’autres auraient eu du mal à justifier en deux heures de métrage. Oui, son film se tient de A à Z et parvient même à faire oublier rapidement l’aspect tortueux de son intrigue pour mieux se concentrer sur le respect religieux des genres auquel il prête révérence. En un mot comme en cent Looper représente un peu l’improbable point de convergence entre Les Affranchis et Retour vers le futur , le tout saupoudré d’un soupçon d’Akira et surtout L’Armée des Douze Singes . Rien que ça !

Avec panache, il embarque le spectateur au sein d’une virée sauvage et temporel jouant malicieusement des lois du destin, véritable leitmotiv d’un film riche en réflexions sur le caractère aléatoire ou pas de l’existence. Au sein de cet univers moins balisé qu’il n’en a l’air, Gordon- Levitt et Willis trainent avec lancinance et style leurs carcasses d’icônes cassées bien décidées à ne pas laisser le temps faire son ouvrage. Des bases promptes à créer une mythologie fascinante que Reynolds ne se prive pas d’exploiter laissant entrevoir ici et là d’infinis possibilités d’exploitation. L’air de rien, le cinéaste a créer un tout nouveau sillon au sein du paysage SF. Pour le coup on peut affirmer que Johnson n’a pas « loopé » son coup !
IlanFerry
8
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le 6 nov. 2012

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IlanFerry

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