L'image de début et de fin de « Lord of War » montrant Nicolas Cage en costume-cravate avec un attaché-case à la main devant un tas de munitions, résume bien ce film polémique. Durant le générique à la BO pêchue, on suit le parcours d’une balle, de sa sortie d’usine aux théâtres des opérations, pour finir dans le front d’un innocent ! Les commentaires du film sont extrêmement cyniques à l’image du personnage principal (« Un homme sur douze est armé sur cette planète. La seule question est : comment armer les onze autres ? » ; « La violence est dans notre nature. Le plus vieux squelette humain était criblé de flèches. » ; « Je préfère que mes clients ratent leurs cibles. L’essentiel est qu’ils tirent. », etc.). Certains dialogues sont plus incongrus (« Tu peux me ramener le flingue de Rambo ? - Lequel ? Celui du un, deux ou trois ? »). Notre VRP fait l’éloge de ses produits avec une froideur toute professionnelle comme l’historique et la description dans les moindres détails de la tristement célèbre kalachnikov. Mais lorsqu'on voit notre vendeur d’armes juste derrière un combattant en pleine bataille ; le démonstratif vire à l’invraisemblable. Heureusement, avec ses images chocs qui valent bien des discours (enfants mutilés, enfants-soldats exécutés, populations massacrées à mille lieues des salons d’armement et leurs mannequins sexy), « Lord of War » dénonce clairement les conséquences tragiques du trafic d’armes partout dans le monde. Nicolas Cage montre ici plusieurs facettes de son talent avec l’évolution de son personnage qui passe d’acteur à victime de ce commerce souterrain. Le film raconte également la vie personnelle de notre commerçant un peu spécial sur plusieurs années (les relations avec son frère turbulent et idéaliste ; la femme idéale avec qui il fonde un foyer) parallèlement à son activité professionnelle (ses affaires, des pays de l’Est aux dictatures africaines ; la concurrence impitoyable ; l’agent qui le traque sans relâche). Si la première subit de gros changements ; la seconde continue de plus belle au-delà du film et ce malgré une arrestation. Pour certains, la voix off alourdit le film et fait un peu prétentieux. Selon moi, elle clarifie le message et donne du cachet au film. Sinon, j’aime bien le passage où notre trafiquant d’armes maquille en catastrophe un bateau avant que des gardes ne l’accostent ou la scène dans laquelle le personnage de Nicolas Cage refourgue à la hâte son stock de kalachnikovs à de pauvres paysans pour échapper à un contrôle. Vraiment, tout cela est bien immoral. Il faut dire que les mots « trêve » et « négociation » sont les pires ennemis du marchand d’armes. Bref, voilà un film intéressant et unique dont on aurait tort de se priver, à condition d’être attiré par le sujet.