Ce porno a un scénar très étoffé

C'est l'histoire du deuil d'une relation, de la fin d'un amour et de la souffrance de la rupture. C'est mon premier film de Gaspar Noé et j'avoue qu'on a à voir des images belles et inhabituelles. C'est lent et lancinant, ça donne une dimension très mélancolique à ce film.
Murphy, le personnage principal, y est proprement pathétique ; torturé par les remords des évènements qui ont conduit à sa fin douloureuse l'histoire d'amour qu'il partageait avec Electra. Les images qu'il nous est donné de voir subliment les émotions par lesquelles passent ces personnages.


Murphy est étudiant en cinéma, Electra en art, tous les deux s'aiment et sont sur la même longueur d'onde pour le meilleur et le pire. Love retrace l'histoire de leur relation et entre dans toute leur intimité pour dresser le portrait le plus fidèle possible d'un amour tumultueux. Un jour, ils invitent leur nouvelle voisine Omi à les rejoindre dans leurs ébats pour satisfaire leurs fantasmes ; plus tard Murphy ira la voir sans Electra et elle en tombera enceinte, pas de bol elle est contre l'avortement. Cette paternité extra-conjugale est l'énième coup qui mettra définitivement fin à ce couple.


Murphy se réveille à côté d'une femme avec qui il ne partage rien si ce n'est un fils. Il tourne en rond dans son appartement et dans sa tête, il rumine les images d'un bonheur passé, il est au fond du trou.
J'aime beaucoup la manière dont sont traitées les maisons dans les films, elles peuvent exprimer tellement de choses sur les personnages. Ici, on passe le plus clair de notre temps dans l'appartement de Murphy et au fil du temps sur lequel s'écoule l'histoire, on peut en apprécier l'évolution. Au début bordélique comme une caverne d'Ali Baba et rempli d'affiches de films lorsqu'il vit avec Electra, il est plus rangé, plus carré, avec une déco plus sobre lorsqu'il vit avec Omi et leur fils. Le seul coin encore vraiment à Murphy est une étagère où sont rangés tous ses films. Le contraste des lieux entre deux périodes de temps est saisissant, au début ils sont comme une extension de sa personne qui se reflète sur les murs, à la fin elle se cantonne à une étagère ; il n'est plus chez lui même en étant chez lui.


Au fil des mémoires de son personnage, le film arrive de par sa mise en scène, ses couleurs, ses décors à nous montrer des images chargées d'émotions ; l'enthousiasme des débuts, des découvertes, l'oppression et le malaise des engueulades, les doutes, la tristesse, la déception...
Tout le film se passe dans l'appartement et les pensées d'un Murphy solitaire, comme si le monde extérieur n'existait pas. Il erre dans l'obscurité de son appartement aux lumières tamisées, qui ne traduisent que son enfermement et le pathétisme de son désespoir. Il est enfermé dans une situation qui l'étreint, avec une femme qu'il n'aime pas et un fils qu'il n'a pas voulu, sa seule échappatoire et de se rappeler ses souvenirs d'une femme qu'il aime encore et dont il ne sait plus rien. Le film est d'ailleurs parsemé de petites coupes dans le montage qui semblent être des clins d’œils, les raccords de ces bribes de mémoire qui s'assemblent morceau par morceau.


Évidemment il faut en parler, quand je disais que ce film montrait l'amour de ses personnages dans toute leur intimité, je parlais de leurs sentiments mais aussi de leur vie sexuelle, car il y a du cul dans ce film, beaucoup de cul. Gaspar Noé part du principe que Sexe et Amour vont de pair et ne peut montrer la vie d'un couple sans montrer les deux, comme l'explique au cours d'une fête Murphy qui ressemble beaucoup à son réalisateur dans le discours.
Ainsi, on a beaucoup de scènes de sexe non-simulées dans Love mais toujours magnifiées par la mise en scène ; c'est lent, ça prend le temps, c'est très sensuel (sauf une scène de levrette vénère post-rupture). Tout est montré dans le détail sans tabou, on voit les corps s'enlacer et se confondre, les mains se balader, on entend les soupirs, les baisers et autres bruits humides.
On a une réelle proximité avec les amants, on connaît si bien leur vie privée qu'ils nous semblent terriblement authentiques, on se sentirait presque faire partie de l'aventure.


J'ai tout de même ressenti des longueurs et des redites dans la deuxième moitié du film. A force de "je t'aime moi non plus" le temps s'étire au bout du parcours, ça s'engueule ça se rabiboche et quand bien même ça ne fait qu'exprimer une réalité, ça pèse sur le rythme.


Un film qui parle d'amour, dans toute son intimité, ses joies et ses malheurs ; qui exprime si bien l'insouciance du moment, la désillusion des ruptures et les souffrances qui vont avec.

Yfigg
9
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le 30 sept. 2021

Critique lue 37 fois

Yfigg

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